Peut-on apprendre à être heureux ?

La psychologie se met au positif. Pas pour sacrifier à la mode ou vaincre la sinistrose ambiante mais pour revenir à l’être humain, reconnaître ses forces autant que ses fragilités.

Le rire n’est-il pas le propre de l’homme ? La recherche du bonheur est inhérente à notre nature. La psychologie positive tente de prendre en compte l’être humain dans sa globalité et non pas sa seule souffrance. Photos MAXPPP

Peut-on nous vendre du bonheur en boîte ? Une piteuse notion de bien-être conjuguée à toutes les sauces, du fauteuil de massage dernier cri au matelas qui comblera toutes nos nuits, devenue banale affaire de business.

La psychologie positive serait-elle à ranger dans le même sac ? Elle qui se focalise sur les aspects positifs de l’existence, étudie conditions et processus de l’épanouissement des personnes et des groupes. Freud et Lacan, les intouchables de la psychanalyse française, doivent se retourner dans leurs tombes !

Mais à bien y réfléchir, Lacan, le grand théoricien, ne s’intéressait guère à l’humain, encore moins à son bien-être. Quant à la psychanalyse en général, n’a-t-elle pas toujours été plus attachée à la pathologie et à la souffrance qu’à l’homme et son bonheur.

Bonheur, le mot est lâché. Une utopie qui s’envole à peine touchée du doigt. Ou une réalité que l’on pourrait atteindre avec méthode ?

« Est-ce un hasard si le culte du bien-être arrive aujourd’hui, dans le contexte psychosocial que nous connaissons ? », interroge Cyril Tarquinio, professeur des universités et responsable du laboratoire psychologie de la santé à l’Université de Lorraine.

L’universitaire vient d’organiser sur le campus du Saulcy, à Metz, un congrès intitulé « psychologie positive et modernité ». Des universitaires, étudiants, praticiens, cadres du milieu hospitalier ou coachs, soit plus de deux cents personnes, étaient présentes sur les deux journées réunissant la fine fleur de la discipline. Une conférence publique donnée par le Pr Gustave Fischer a également réuni plus de deux cents personnes venues entendre parler de « p sychologie positive face aux épreuves de la vie ».

Le concept n’est pas anodin

Piège à gogo, s’insurgeront certains. Le Pr Tarquinio accepte critiques et suspicions et apporte lui-même les limites au concept. « Un congrès comme le nôtre est aussi fait pour alerter. Concept et outils ne sont pas anodins et peuvent être un levier de manipulation. » Les entreprises ont été parmi les premières à adhérer et organiser des séminaires de psychologie positive. Suspect ? Demain, aura-t-on encore le droit d’être mal dans sa peau ?

« C’est la première fois, lors de l’organisation d’un congrès, que des personnes sont venues proposer des travaux que je qualifierai d’ésotériques, admet Cyril Tarquinio. C’est le risque de la simplification à outrance. Si on n’est pas vigilant, ça pourrait être le retour de la méthode Coué. C’est pour cela que l’association française et francophone de psychologie positive a dressé un cahier des charges très précis.»

L. S.

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