Petites astuces psychologiques pour acheter le bon cadeau

Noël, J-7 : des soucis pour choisir vos cadeaux ? Justine débarque, armée d’études et d’expériences, pour vous aider à vous décider !

Trouver un cadeau, c’est souvent complexe. Il y a vos envies à vous, celles de la personne qui recevra votre présent, votre intention (ou non !) de lui faire plaisir, de lui dire quelque chose, de transmettre une émotion…  Nos cadeaux disent des choses de nous, même lorsque nous les choisissons sans trop y prêter attention.

Dans un article pour l’AARP, Candy Sagon présente justement 3 astuces scientifiques sur la démarche d’offrir – si vous le voulez bien, reprenons sa démarche… et creusons un peu plus.   

Astuce #1 : ce n’est pas l’intention qui compte

Mais alors, vraiment pas : en 2011, une étude, menée par le docteur en psychologie Nicholas Epley et publiée dans le Journal of Experimental Social Psychology, a constaté que les gens appréciaient davantage un cadeau qu’ils ont explicitement demandé. Autrement dit, c’est bien le cadeau qui compte – et non pas l’intention.

Selon l’analyse de Francesca Gino et Francis Flynn (qui ont mené une série d’études sur le sujet), l’intention est surtout importante pour celui qui donne : ça nous aide à nous sentir bien, à être fiers de nous… Mais ça ne rend pas celui qui reçoit plus heureux. Gardons en tête que les personnes qui reçoivent nos cadeaux n’ont pas le même contexte de référence que nous : si vous avez posé 3 R.T.T., grillé 46 neurones et dépensé toute votre énergie pour leur trouver le bon truc, les receveurs ne le savent pas. Ils n’ont pas conscience du temps et des efforts que vous avez consacrés à la poursuite du cadal parfait. EH OUAIS, ingrats que nous sommes.

Par exemple, lorsque les deux chercheurs interrogent des couples mariés sur leurs cadeaux de mariage, ils semblent préférer nettement les cadeaux issus de leur liste plutôt des cadeaux « non sollicités ». Avec une liste de souhaits, les receveurs potentiels de cadeaux disent ce qu’ils veulent vraiment, et si vous choisissez de ne pas piocher dedans, vous leur dites plus ou moins « Je sais mieux ce que tu veux que toi-même »… Ce qui ne suscite pas de reconnaissance particulière de leur part. En fin de compte, selon les mots d’Epley, « le secret pour être un donneur de « bons » cadeaux… c’est de leur donner ce qu’ils veulent » (du moins si le receveur vous a fait part de ses souhaits : si comme moi, vous avez un père qui vous sort du « Je ne veux rien, garde tes sous » la main sur le cœur, chaque année, ça reste un peu foutu).

Astuce #2 : l’argent (alloué au cadeau) ne fait pas le bonheur (des receveurs)

Quelle bande de relous ! Non seulement ils se tamponnent de nos intentions, mais en plus, ils ne seraient pas plus contents lorsqu’on utilise nos économies pour leur faire un chouette présent ?

C’est en tout cas la conclusion de Francesca Gino et Francis Flynn : les cadeaux chers ne seraient pas plus appréciés que les autres, surtout si ce sont des choses que le receveur ne souhaitait pas vraiment avoir. Une fois encore, la différence n’existerait que dans l’œil du donneur de cadeau…

À tel point que, lorsque Francis Flynn et Gabrielle Adams (menant une autre recherche sur le même sujet) demandent à des personnes de se souvenir d’un cadeau d’anniversaire qu’ils ont offert, une corrélation apparaît clairement entre le prix et les attentes. Plus nous dépensons d’argent pour un cadeau, plus nous attendons de satisfaction de la part de ceux qui le reçoivent. Vous me direz, bordel de nouilles, il n’y avait pas besoin de chercher midi à quatorze heures pour arriver à cette conclusion, si ?!

Le truc, c’est que lorsque l’équipe demande à des gens de se souvenir d’un cadeau d’anniversaire qu’ils ont reçu (et non plus d’un cadeau qu’ils ont donné), cette fois, le prix semble ne plus compter… Ceux qui ont reçu des bijoux ne seraient pas plus reconnaissants que ceux ayant eu des t-shirts (ça tombe bien : l’an dernier, lorsque mon mec-compagnon-super Y* m’a offert une trop chouette bague, je lui ai offert un t-shirt Batman à paillettes) (je me sentais à peu près comme un petit troll : « U mad ? »).

Selon Flynn et Adams, ce phénomène, tout comme celui de l’intention-qui-ne-compte-pas, serait dû à un « biais égocentrique » de la part des donneurs, qui se concentrent sur leur propre expérience d’achat : j’ai passé 107 ans à choisir ce truc et il m’a coûté une blinde, Plectrude a intérêt à s’en souvenir toute sa vie !

L’argent ne ferait pas complètement le bonheur, m’enfin ça dépendrait tout de même de sa forme : selon les conclusions de Flynn, Adams et Gino, recevoir de l’argent apporterait encore plus d’appréciation que les cadeaux tirés d’une liste (que les receveurs transmettent, donc), même si ces cadeaux sont du même montant !

Astuce #3 : faire fi de la culpabilité du recyclage de cadeau

Puisque nous sommes en train de balayer toutes nos croyances, continuons donc : recycler les cadeaux, redonner un présent que l’on aurait soi-même reçu serait tout à fait acceptable – en tout cas, selon une enquête reportée par le Wall Street Journal.

Une recherche menée par Flynn, Adams et Norton (constituée d’une série de 5 études) explore le principe de « recyclage de cadeau », à la fois du point de vue du donneur originel (celui que vous a offert le cadeau que vous souhaitez recycler) et du receveur (qui pourrait bien recycler ce cadeau), et souhaite comprendre si cette pratique est réellement blessante pour les donneurs.

EH BIEN NON, figurez-vous : dans leurs résultats, même si les participants « recycleurs potentiels » sont persuadés que les « offreurs » vont être offensés, en réalité ils ne le sont pas vraiment.

Pour illustrer leurs dires, dans l’une de leurs études, des individus sont répartis dans les rôles de donneurs et de receveurs. On demande à tout ce petit monde de lire un scénario dans lequel un receveur se voit offrir une montre pour célébrer un diplôme. Aux individus « donneurs originels », on dit d’imaginer que le receveur a soit redonné la montre à un ami, soit a jeté cette montre. Aux receveurs,  on présente les mêmes options : ils doivent imaginer qu’ils ré-offrent la montre à un ami, ou qu’ils la jettent.

Ensuite, tous les participants (donneurs et receveurs) doivent évaluer à quel degré le donneur serait offensé dans chaque scénario. Résultats :

  • les donneurs sont moins offensés lorsque le receveur a redonné la montre à quelqu’un que lorsqu’il l’a jetée…
  • …mais les receveurs-recycleurs sont convaincus que les donneurs sont offensés de la même manière pour les deux options.

Autrement dit, aux yeux des receveurs, recycler ou jeter reviendrait à faire la même offense… Les chercheurs analysent ce constat de la manière suivante : d’un côté, les receveurs auraient le sentiment que les donneurs devraient avoir leur mot à dire sur ce qu’il arrive à leurs cadeaux, alors que de l’autre côté, les donneurs considèrent que les receveurs ont bien le droit d’en faire ce qu’ils souhaitent… Le problème résiderait bien plus dans le tabou, le stigmate lié au recyclage de cadeau – selon les mots de Gabrielle Adams, « Redonner, ce n’est pas une mauvaise chose. En fait, c’est un moyen de s’assurer que les présents sont transmis à ceux qui en profiteront réellement. Les gens ne devraient pas avoir peur de transmettre un cadeau qu’ils ont reçu à quelqu’un d’autre ».

En fin de compte, même en sachant tout ça, le cadeau reste une transaction sociale complexe, où les sentiments du donneur sont aussi importants que ceux du receveur… Parfois, on offre aussi certains cadeaux pour se sentir bien – si nous avons besoin de trouver quelque chose de spécial pour montrer quelque chose de nous, faisons-le. Mais si seule la satisfaction du receveur vous importe, ne culpabilisez plus, boîtes de chocolats et t-shirts rigolos pour tout le monde – après tout, ce sont les conseils de la science, hé !

 

* savoir comment nommer son amoureux, la plaie : « conjoint » – trop vieux, « amoureux » – trop Carla Bruni, « mec » – trop Patricia Kaas, « copain » – trop 2nde F, « ami » – trop adultère, « chéri » – faut pas pousser…

Pour aller plus loin :

 

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