Les “self-help movie”: le cinéma qui mêle coaching et psychologie …

Adapter au cinéma non pas un roman mais un guide de développement personnel ? Le pari était risqué, ce qui n’a pas empêché Hollywood de s’en sortir, comme il en a l’habitude, plus que gagnant. Il s’agirait même de la dernière tendance dans le cinéma américain, après le succès inattendu des très rentables Ce que pensent les hommes (près de 180 millions de dollars en 2009) ou du plus récent Think Like a Man (90 millions de dollars seulement aux Etats-Unis depuis sa sortie fin avril). Et ce, malgré leur absence de stars et leur coeur de cible principalement afro-américain.

Tous deux sont donc tirés de best-sellers qui mêlent coaching, psychologie positive et autosuggestion à la Coué, oracles bon marché et successful en ces temps de détresse. Ce business a généré 11 milliards de dollars en 2010, selon une étude Market Data. Hollywood y a vu clair : si les programmes de rétablissement personnel en douze étapes marchent aussi bien en librairie, pourquoi alors ne cartonneraient-ils pas en salle ? Le tout dernier exemple farfelu du phénomène s’appelle Ce qui vous attend si vous attendez un enfant, adaptation au cinéma de la très connue Baby Bible, publiée en 1985 et vendue à plus de 35 millions d’exemplaires à travers le monde. On n’y trouve aucune histoire à raconter, mais des conseils pour les nouveaux parents tout au long des mois qui précèdent l’accouchement.

http://www.youtube.com/watch?v=JAkIeh4ub3E

A l’écran, cela donne une comédie romantique chorale bourrée de stars, avec des choix de casting plutôt malins. De la même façon que Ce que pensent les hommes faisait de la prétendue queen des calamités sentimentales, Jennifer Aniston, une héroïne obsédée par le mariage, ce film montre une Cameron Diaz, présentée par les tabloïds comme une quadra fêtarde et allergique à la maternité, en gourou du fitness qui tombe enceinte de son partenaire dans une émission de téléréalité.

C’est l’un des rares traits de malice d’un film peuplé de femmes au bord de l’overdose hormonale, imprégné de blagues qui tombent à plat et dégoulinant de mièvrerie. Pour preuve, la phrase “Un miracle opère dans mon intérieur”, prononcée sans une once d’ironie et à plusieurs reprises.

Sous son aspect inoffensif, le film cache les yeux sans visage d’un cinéma purement réac, où les plans d’un soir terminent en fausse couche, l’avortement y demeure un absent mystérieux (le mot n’est pas mentionné une seule fois) et tout personnage qui n’adhère pas au dogme reproductif est traité avec mépris ou indifférence.

“Ma première réaction quand on m’a proposé cette adaptation fut la même que la vôtre : ‘Quoi ?”, reconnaissait récemment l’auteur du livre, Heidi Murkoff, également productrice du film. “Mais j’ai réalisé que tout ce que Hollywood a l’habitude d’utiliser – les drames, les hauts et les bas, les tribulations et les triomphes, les relations qui changent, l’humanité et la comédie – était bien présent pendant la grossesse”, ajoutait-elle.

La critique américaine n’a pas soutenu Heidi Murkoff, voyant dans le film la dernière preuve d’une gravissime panne d’idées dans le cinéma mainstream et du faible état de santé présenté par la comédie romantique.

Mais Hollywood ne compte pas abandonner. Les adaptations de deux classiques du développement personnel – Les hommes viennent de Mars, les femmes viennent de Vénus et The Game - seraient déjà en préparation. A quand l’adaptation de Guide à l’usage des parents d’enfants bilingues ou des Abdos fessiers des paresseuses ?

Leave a Reply