« Le talent, on l’a ou on ne l’a pas mais des forces, tout le monde en …

A vec la psychologie positive, ne risque-t-on pas de promouvoir une méthode Coué bis ?

Charles MARTIN-KUMM, président de la société française et francophone de psychologie positive : « C’est justement ce qui nous cause du tort. La psychologie positive est une science, éprouvée d’un point de vue scientifique. Elle ne s’oppose pas aux autres pratiques et ne se suffit pas à elle-même. Mais elle vient compléter ce qui existe déjà et met à la disposition des praticiens des outils complémentaires. »

De quel type ?

« Par exemple, le talent, on l’a ou on ne l’a pas. Mais des forces, tout le monde en a. Il s’agit d’identifier nos forces, en prendre conscience et apprendre à s’en servir. La psychologie positive est une science qui prend en compte l’être humain, dans toute sa dimension. Finalement, les psys en savent peu sur les "êtres normaux" et leur épanouissement ! »

Quelles sont ces forces ?

« Une liste de vingt-quatre forces a été dressée : courage, humanité, justice, modération, transcendance, en font partie. Il ne s’agit pas de nier l’existence de la souffrance chez la personne mais de la contrebalancer. »

Peut-on promettre le bonheur ?

« Il ne s’agit pas de réduire la psychologie positive à l’étude du bonheur ou à un simplisme béat. D’un autre côté, elle n’a pas pour mission de soigner les gens en grande souffrance. Cette discipline vient en complément et cherche à potentialiser quelque chose qui permettra d’aller mieux, d’élever le degré d’optimisme des gens. »

Cyril TARQUINIO , professeur à l’Université de Lorraine : « L’état d’optimisme ou de bien-être a des effets sur la santé. Un fait scientifiquement prouvé. En optimisant ces états, on optimise le rapport à soi et au monde. »

Ne tombe-t-on pas dans le culte de l’épanouissement individuel ?

« C’est le reproche qu’on pourrait faire. Son bonheur à soi et non pas le bien-être collectif. Néanmoins, de plus en plus de personnes sont en quête personnelle. Elles ne vont pas mal mais ne sont pas bien non plus et beaucoup veulent se donner les moyens de s’épanouir, de donner un sens à leur vie. »

Quête de soi, du sens à la vie : on touche à la spiritualité.

« La spiritualité, à différencier de la religion, n’est plus taboue. Les individus sont d’abord des êtres spirituels et la psychologie positive peut le promouvoir. On revient à la psychologie de l’être et non pas à celle de l’avoir. Scientifiquement, la méditation ou la prière ont montré leur efficacité sur le stress, dans le suivi de dépressions, douleurs chroniques ou le suivi de cancers. Ces choses-là ne sont pas à regarder avec dédain mais avec un sens critique. En juin dernier, une thèse « Spiritualité, santé et maladie » a été soutenue au sein de mon département. Plus les gens développent de l’espoir, cultivent une vie intime ou intérieure, plus ils peuvent se projeter et agir face à la maladie et son traitement. »

La psychologie positive regarde aussi différemment les événements traumatiques.

« Oui, des outils existent pour permettre de se remettre d’un choc, revenir à un niveau d’équilibre. Elle nous apprend aussi à tirer d’autres compétences, d’autres aptitudes suite à ces épreuves. Une idée jusqu’il y a peu impossible à développer en France. Parce que nous possédons une culture du pathos, que la psychologie est plutôt orientée vers la souffrance et le malheur. »

Propos recueillis par Laurence SCHMITT.

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