La fausse psychologue avait berné la Fondation Chirac : deux ans …

Le regard éteint, serrée dans son long manteau rouge, Chantal B égrène ses explications d’une voix faible. Dans le box du tribunal de Brive, cette femme de 55 ans, originaire du Nord, donne à voir une tout autre image que celle qui a séduit la Fondation Chirac, début décembre, lors d’un entretien d’embauche.

Son allant, son parcours au sein de la Banque de France et ses diplômes estampillés « université de Lille » convainquent trois recruteurs de la Fondation, dont un psychiatre, d’offrir à cette quinquagénaire un poste de psychologue au sein de l’institution usselloise. « Vous avez fait très bonne impression, relate le juge Albert. On vous décrit comme calme, sereine, connaissant particulièrement bien la structure ». Pourtant, tout son CV est faux. Des expériences professionnelles aux diplômes de psychologie, piratés sur Internet. « La Fondation explique qu’elle partait du principe que le CV et le diplôme étaient vrais », précise le président du tribunal. « Travailler avec les autistes, c’est une vocation », essaie de se justifier Chantal B.

« Manipulatrice »

C’est grâce à son extrait de casier judiciaire que le pot-aux-roses est découvert, deux semaines après ses débuts à la Fondation. La dame a été condamnée à treize reprises pour faux et escroqueries, la dernière fois en janvier dernier.

« Quand vous produisez des faux, quelle analyse faites-vous de la situation puisque vous êtes un peu psychologue dans votre tête ? », lance le juge Albert. « C’est très mal », admet la prévenue, dans un élan de sincérité qui tranche avec ses précédentes déclarations. En garde à vue, elle a multiplié les dénégations, évoquant des liens imaginaires avec la fille de Jacques Chirac. « J’ai postulé parce que je ne savais pas que j’allais être retenue. C’était pour me dire, peut-être que si je n’avais pas eu d’accident de la vie, je serais dans une de ces structures », dit-elle avant de faire le récit d’une vie à la Zola. « Je ne voulais pas faire de mal, simplement partager. Je lis beaucoup, je vais à des conférences. Ces deux semaines sont les plus belles de ma vie. J’étais dans mon élément, je réalisais un rêve », sanglote-t-elle soudainement. Ce parcours de vie « invérifiable » n’émeut pas le parquet.

« C’est une bien étrange personne que vous avez à juger », observe la substitut Abrantes. « Dans un premier temps, je me suis dit qu’elle avait des problèmes psychiques, mais l’expert n’a décelé aucun trouble ». Le parquet n’a pas de mots assez durs contre celle qui a abusé de la confiance de parents dont les enfants étaient « entre les mains d’un escroc ». « C’est une grande manipulatrice. On a découvert d’autres faux en préparation. Des imprimés vierges avec le logo de la Fondation ». Le tribunal prononce une peine de trois ans dont deux ferme avec mandat de dépôt et interdiction d’exercer une activité avec des autistes. 

Jean-Paul COHADE

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