Faire connaître ses réalisations

C'est bien beau de vouloir gravir les échelons, mais encore faut-il que nos patrons soient au courant de nos aspirations. Comment le leur faire savoir sans trébucher ?

En fait, avant même de verbaliser nos ambitions, il faut bien se connaître. «Ça semble évident, mais ce n'est pas maîtrisé par tout le monde», prévient Julie Carignan, associée chez SPB Psychologie organisationnelle. Pourtant, prendre un moment de recul peut s'avérer un investissement très rentable lors de futures conversations de carrière. Surtout si on prend le temps de dresser le bilan à la fois de nos talents et de nos motivations. «Dans quoi suis-je bon ? Qu'est-ce qui me donne des étincelles dans les yeux ?» résume Mme Carignan. Cette réflexion permettra de viser des responsabilités qui correspondent réellement à nos capacités et à nos désirs, et d'être plus confiants pour les demander.

«Tout le monde devrait réfléchir à ses objectifs de vie des cinq prochaines années dans une mini-réflexion stratégique annuelle», suggère Catherine Privé, pdg d'Alia Conseil. Sommes-nous bien alignés ? Devons-nous maintenir le cap ? «Après, il faut oser mettre en place ce que ça prend pour atteindre nos objectifs.»

Ce qui nécessite d'assumer son ambition... et d'accepter de l'exprimer ! «On doit se donner la permission de nommer honnêtement et clairement nos ambitions», conseille Gisèle Casavant, vice-présidente de Stratégies Conseils JLB. Pour ce faire, elle suggère d'avoir un plan de développement bien défini. Après tout, la stratégie de communication doit être axée sur une question fondamentale : que voulons-nous ?

Brigitte Simard, consultante chez Spencer Stuart, abonde dans le même sens. «Il faut le communiquer [qu'on a de l'ambition] et arrêter de penser que les gens vont le deviner», dit-elle en précisant que les femmes sont encore plus timides que les hommes quand vient le moment d'avouer leur ambition. Heureusement, ajoute-t-elle, les jeunes femmes sont plus à l'aise de le faire, quoiqu'elles ne le soient pas encore autant que leurs collègues masculins.

Hommes et femmes ne demandent effectivement pas les choses de la même façon, observe également Anne-Marie Hubert, associée directrice, services consultatifs chez EY. «Les femmes ont confiance dans le leadership [au sein de leur entreprise] et pensent que, si elles sont bonnes, leur patron va leur offrir les promotions.»

Ce qui n'est malheureusement pas toujours le cas. Pas qu'il y ait de la mauvaise volonté : les leaders ne sont tout simplement pas au courant de leurs réalisations et de leur potentiel. Un constat qui s'applique également aux hommes plus introvertis.

Pour changer cette situation, les entreprises doivent faire un bout de chemin, fait valoir Coleen MacKinnon, directrice régionale, Québec et provinces de l'Atlantique, chez Catalyst Canada. Les organisations doivent, entre autres, sensibiliser leurs gestionnaires aux différences de comportements et aux préjugés inconscients. «Si l'entreprise n'est pas au courant des différences et n'apporte pas son soutien, il n'y aura pas vraiment de changement.»

Cela dit, tous s'entendent pour dire que les femmes - et les hommes plus timides - pourraient aussi jouer un rôle plus actif dans l'avancement de leur carrière. Comment ? En trouvant des façons de se mettre en avant avec lesquelles elles (ou ils) sont à l'aise.

«Ça passe généralement mieux en rencontres individuelles qu'en public», indique Mary Lou Maher, associée responsable de la diversité chez KPMG. Il faut évidemment discuter de ses réalisations et de ses aspirations avec son supérieur immédiat, mais aussi avec le patron de ce dernier. Et pas besoin de le faire en cachette, au contraire. «Parlez-en à votre gestionnaire et n'hésitez pas à lui demander de vous présenter au besoin.» Évidemment, ajoute-t-elle, c'est encore mieux si vous avez déjà noué des liens !

Résumer notre valeur ajoutée

Pour tirer le maximum de ces discussions, mieux vaut ne pas lésiner sur la préparation. En quelques mots, nous devons être capables de résumer notre valeur ajoutée dans l'entreprise. Que faisons-nous de bien ? Comment contribuons-nous au succès de l'équipe ? Qu'est-ce qui nous distingue ? Si un papier et un crayon suffisent pour amorcer l'exercice, un coach peut s'avérer bien utile pour le terminer. «Ça vaut la peine de mettre le temps et l'énergie nécessaire pour créer, en quelque sorte, votre marque», dit Mme Maher.

Anne-Marie Hubert suggère elle aussi de se tourner vers un coach. Il nous aidera à communiquer toutes nos réalisations, y compris celles qu'on pourrait, à tort, juger comme allant de soi. On peut penser, par exemple, à l'aide apportée aux collègues ou à l'appréciation des clients.

Une telle préparation permettra d'arriver bien outillés et confiants aux rencontres d'évaluation. Ces dernières sont un bon moment pour faire le point, mais aussi pour poser des questions. Qu'arrivera-t-il si nous atteignons nos objectifs ? Sommes-nous sur la bonne voie pour une promotion ? Qu'est-ce que ça prendrait pour y arriver ? «Il faut oser avec des discussions de carrière», soutient Mme Hubert.

Que peuvent faire les entreprises ?

«Parfois, les gens ont moins d'ambition, mais beaucoup de talent. Ils n'ont pas prévu faire de la gestion de personnel, mais quand ils y sont amenés, ils se révèlent d'excellents gestionnaires, axés sur l'équipe. C'est souvent au patron à les repérer.» - Richard Joly, président de Leaders Cie

«Les leaders ont la responsabilité d'évaluer la performance actuelle de leurs employés, mais surtout leur potentiel de progression. Il faut que ce soit plus qu'un voeu pieux : ça doit être un processus formel.» - Julie Carignan, associée chez SPB Psychologie organisationnelle

«Les organisations peuvent aider leurs employées à faire les bons choix en matière de carrière. C'est bien de vouloir aider, mais il faut après un certain temps transférer les clients indésirables à un autre et oser demander des mandats pertinents.» - Anne-Marie Hubert, associée directrice, services consultatifs chez EY

«Il faut avoir le courage de dire à ses employés et collègues ce dans quoi ils excellent et ce qu'ils feraient mieux de laisser à quelqu'un d'autre.» - Rose-Marie Charest, présidente de l'Ordre des psychologues du Québec.

L'ambition

Série 1 de 4. Se fixer des objectifs et se donner les moyens de concrétiser ses ambitions est plus facile à dire qu'à faire. Cette série vous donnera des outils pour passer à l'action.

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