Tuerie en Haute-Savoie : à présent, il faut ramener la fillette à la …

Des gendarmes à procimité du lieu a été retrouvé la fillette, près de Chevaline, le 5 septembre (A.MORO/SIPA).

 Des gendarmes à proximité du lieu où a été retrouvé la fillette, près de Chevaline, le 5 septembre 2012 (A.MORO/SIPA).

 

Devant un tel traumatisme, l’impact sur l’enfant va dépendre de la manière précise dont les faits criminels se sont déroulés, et du degré d'exposition de la fillette à cette fusillade.

 

A cet âge, l’impact sur la psychologie de l’enfant dépendra de l'évènement mais aussi de la réaction parentale à cet évènement. S’il y a eu des cris, des heurts, une séquestration longue et que l'enfant a pu percevoir une détresse extrême chez ses parents, cela peut aggraver l'impact post-traumatique.

 

Les conséquences psychologiques d'un tel évènement dépendent aussi du niveau de développement de l'enfant. On estime ainsi qu'ils se forgent une conception relativement stable de la mort vers l’âge de 7-8 ans, ce qui coïncide avec le début de l’âge scolaire.

 

Ils prennent alors conscience de son aspect irréversible (la mort est définitive) et se détachent d’une conception plus "naïve" où une personne morte reste vivante pour l’enfant, qui l’assimile à un fantôme. En revanche, certains enfants confrontés très tôt à des évènements mortifères peuvent se forger une conception précoce de la mort, et son irréversibilité peut être acquise dès l’âge de 4-5 ans.

 

Des risques de stress post-traumatique

 

Les séquelles, après un tel trauma, sont de plusieurs ordres. On constate chez la victime tout d’abord un stress post-traumatique, des flash-backs récurrents, des terreurs nocturnes, des réactions phobiques mais aussi une attitude de repli et d’isolement.

 

Dans l’immédiat, le travail des psychologues est de chercher à la "décoller" de l’évènement, par une attention minimum, afin de la ramener "à la réalité", sortir de l'état de confusion en réintroduisant des repères géographiques et chronologiques. Il s’agit de reconstituer un environnement stable et montrer à la personne qu'elle n’est pas seule.

 

Dans un deuxième temps, après quelques jours, dans une phase que l’on pourrait appeler de "débriefing", on lui proposera de s'exprimer sur l’évènement en lui-même (pensées, ressentis et réactions pendant et après l'évènement).

 

Chez les enfants, on utilise généralement un outil de médiation tel que le dessin ou le jeu. Mais cela ne doit pas être fait trop tôt.

 

Dans ces situations, les diagnostics psychologiques sont longs à établir (l'instauration d'un traumatisme psychique peut durer trois mois à six mois). Selon la nature de ce diagnostic, une technique de psychothérapie adaptée devra être mise en place.

 

Reconstruire des repères spatio-temporels

 

Des traumas de cette importance exigent ainsi une prise de contact particulière du psychologue. Il faut, par exemple, veiller à ne pas laisser s’instaurer trop de silence dans la discussion avec l’enfant, sous peine de renforcer le traumatisme vécu en lui donnant l'impression qu'il est seul et pas soutenu.

 

La psychothérapie, en revanche, n’est pas forcément un processus très long dans la mesure où les enfants sont encore en développement. Les progrès observés sont souvent plus rapides que chez les adultes.

 

Dans cette situation criminelle particulière, au-delà du traumatisme de la fusillade, il faudra aussi évaluer l’impact qu’a pu produire l’attente de cette enfant dans la voiture, pendant plus de huit heures, auprès de ses parents morts. Pendant ces longues heures, cette enfant s’est retrouvée seul avec son imaginaire, sans adulte pour contenir sa peur et la sécuriser, ce qui est très éprouvant au plan émotionnel.

 

Ces situations extrêmes peuvent provoquer des états dissociés (états seconds) se caractérisant par une perte de repères spatio-temporels et un blocage des processus émotionnels. Cette dissociation est une réaction défensive de survie dont il faut parvenir à sortir par la suite.

 

 

Propos recueillis par Sébastien Billard

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