Shame: la souffrance d’un solitaire…

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Shame...voilà un film qui porte bien son nom. La honte est en effet le sentiment le plus régulier de ce long métrage, pas simplement dans la psychologie du héros mais également dans ce que le cinéaste se permet de montrer à l'écran. Les images et les thèmes généralement jugés honteux pour le grand écran sont ici montrées sans pudeur, un choix qui ne laissera d'ailleurs pas indifférent et pourra faire accuser le film de basculer dans un voyeurisme primaire. Ce serait pourtant sous estimer l'intelligence de ce récit qui a l'ingéniosité de ne pas limiter et vulgariser son sujet. Ce film aurait en réalité davantage mérité de s’appeler Pain, en effet la pulsion sexuelle incontrôlable du personnage n'est qu'un départ à une exploration de la souffrance de l'individu moderne.

Cette douleur est construite dans une solitude permanente de part l'incapacité du héros à communiquer avec son entourage, sa maladresse pour bâtir une véritable relation humaine, sa frustration et son amertume qui se transforment en colère qu'il rejette sur sa sœur, la seule personne qui se soucie réellement de lui. Cette peinture de la solitude moderne n'est pas sans rappeler celle qui avait été dépeinte autrefois dans Taxi Driver et malheureusement toujours d'actualité (en terme d'interprétation Michael Fassbender n'a d'ailleurs pas à rougir face à un Robert de Niro). Si le récit évite déjà les pièges qui pouvaient facilement arriver avec un thème aussi délicat, il est de surcroit joliment embelli par la réalisation avec une esthétique discrète et efficace (une belle dominance de bleu) et des plans séquences intéressants mettant plus que jamais en valeur le jeu des comédiens.

L'addiction sexuelle...Un sujet tellement ouvert à la facilité qu'il est la porte de toutes les dérives. Mais pour traiter sérieusement d'un thème aussi tabou, il fallait un acteur suffisamment talentueux pour ne pas rendre son personnage caricatural, un récit assez intelligent pour se projeter de ce point de départ vers un regard amer sur la solitude et la difficulté des relations humaines, ainsi qu'un réalisateur avec le sang froid nécessaire pour ne pas se faire déborder par le contenu sexuel de son œuvre en oubliant d'en soigner la mise en scène. La chance a sourit à ce film qui possède ces trois qualités. Alors oui Shame dérange, le film aborde son sujet sans prendre de gants mais quand il s'agit de traiter d'un problème aussi intime, cette crudité à priori repoussante permet de crédibiliser un thème si souvent caricaturé. Shame réussit son plus grand pari, à savoir dépasser son cadre sexuel pour plonger le spectateur dans une violence psychologique où la souffrance est condamnée à être vécue dans la solitude.

 

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