Remaniement: Valls, Taubira, et la psychologie de bazar

Il faut en finir avec cette personnalisation de la politique, qui culmine avec cette rengaine du « remaniement  nécessaire » : personnaliser, c’est dépolitiser.

Un remaniement ministériel n’a pour but  que de rendre plus « signifiant » un infléchissement de ligne politique - qui peut, d’ailleurs, très bien se faire sans lui, mais mettrait alors plus de temps à être perçu : il s’agit de bien envoyer un signal à l’opinion; par contre, sans   infléchissement politique, les effets d'un remaniement seront épuisés en moins d’une semaine.

Je parle bien d’ « infléchissement » de la ligne politique, et non de « rupture » ;  celle-ci n’aura pas lieu jusqu’à la fin du quinquennat, et ceux qui l’attendent en seront pour leurs frais : non, Mélenchon ne sera pas nommé Premier Ministre ; non, la « gauche du PS », représentée au gouvernement par Benoît Hamon,  ne rompra pas avec la politique de Hollande.

Tous les changements de Premier Ministre effectués par François Mitterrand (hors changements imposés par les deux cohabitations) ont toujours correspondu à des infléchissements de lignes politiques (Mauroy, Fabius, Rocard, Cresson, Bérégovoy) -sinon, ils n'auraient eu aucun sens ni aucun effet.

Bien entendu, et contrairement à ce que semble penser mon confrère blogueur Juan, Taubira  suivrait en cas de nomination de Valls comme Premier Ministre; il y a un grand mythe à faire de Valls un "dur" et de Taubira une "molle" (ceux qui la connaissent un peu doivent bien rigoler...); cette impression ne vient que des Ministères qu'ils occupent: mais, à l' Intérieur, Taubira ne serait pas moins "dure" que Valls, et, à la Justice, Valls ne serait pas moins "laxiste" que Taubira; et il faudrait peut-être se souvenir que tous deux ne font qu'appliquer, chacun dans son Ministère,  la politique décidée par Hollande. (il n'y a, actuellement, au gouvernement qu'un seul véritable désaccord entre Ministres que Hollande ne semble pas avoir encore tranché, et dont personne ne parle à cause de ses aspects très techniques: celui entre Moscovici et Cazeneuve).

Cessons donc de faire de la politique-spectacle, oublions les individus et les « tempéraments » que nous leur attribuons faussement, abandonnons cette image naïve des Ministres qui feraient chacun ce qu’ils veulent dans leurs Ministères, arrêtons de les étiqueter en « gentils » et « méchants » et d'amuser la galerie avec un jeu de chaises musicales, et, si nous voulons analyser ce qui se passe politiquement, tentons de faire...de l’analyse politique, et pas de la psychologie de bazar ; c’est plus ardu, plus technique, mais c’est la seule façon de comprendre un peu ce qui se passe.

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