Présidentielle 2012 : le profil psychologique des candidats

Retrouvez notre dossier complet

"Le diagnostic des psys" sur les candidats à l'élection présidentielle

dans Le Point n°2064 du 5 avril 2012, en kiosque et en 3D.

François Bayrou, l'extraverti ambitieux

Son profil psychologique est remarquable par la faiblesse de certains scores comme l'humilité. À l'inverse, il affiche un très bon score en domination. Très optimiste, peu impressionnable, il a la certitude inébranlable du paysan ruiné par les intempéries mais persuadé qu'à la saison prochaine la récolte sera exceptionnelle. Il aime le conflit et jouer à celui qui sait tout. Son score en méticulosité est étonnamment faible pour un responsable politique. Il peut faire preuve d'un comportement dilettante.

Sa communication non verbale est froide, hésitante, passive, presque déprimante. Il manque d'expressivité faciale et corporelle. Trop neutre pour imposer sa personnalité.

Pour maintenir son équilibre psychique, il a besoin de se ressourcer. Si la vie de président ne lui en laisse pas le temps, il risque de craquer psychologiquement ou d'être dépassé par les événements.

François Hollande, l'accommodant agréable

Les profileurs étrangers auxquels Pascal de Sutter a envoyé le profil psychologique du leader socialiste ont cru à une erreur : ce ne pouvait être celui d'un candidat à la présidentielle. Son score de domination est exceptionnellement bas pour un dirigeant et son ambition n'est pas très prononcée : 7 contre 21 pour Sarkozy. Il n'a aucun goût pour la domination hiérarchique et, contrairement aux autres candidats, n'éprouve pas de joie à "tuer" l'adversaire.

Son trait le plus saillant est l'esprit de coopération. Il fait confiance, cherche des solutions pacifiques. Il n'est pas colérique et doit se forcer pour faire semblant d'être agressif. Brocardé sur son manque d'expérience à l'international, il possède pourtant un taux élevé de "complexité intégrative", un trait psychologique particulièrement adapté pour gérer les crises internationales.

Un score élevé en extraversion et méticulosité révèle une personnalité qui a besoin de se sentir aimée et approuvée. Il possède un fond de doute, d'inquiétude.

L'accommodant agréable est perçu comme élastique, soumis ou naïf, difficile à détester mais peu enclin à faire rêver. En fait, Hollande tient son cap envers et contre tout. C'est un faux mou.

Marine Le Pen, la dominante révoltée

Avec un score élevé en domination et extraversion combiné à une absence totale d'humilité, elle a le profil type du leader politique. Ce qui intrigue, c'est un score peu élevé en ambition. Cela donne à penser qu'elle a repris le flambeau plus par devoir vis-à-vis de son père que par goût du pouvoir.

Son charisme provient en partie d'une convergence entre son discours et ses expressions faciales. Elle pense vite mais fonctionne de façon désorganisée. Son tempérament révèle une hypersensibilité et une anxiété sous-jacente. L'histoire familiale y est sans doute pour beaucoup. Les attaques contre son père ont forgé chez elle l'idée que le monde était hostile. Le sentiment d'injustice fait partie de son moteur psychique. Elle veut prouver que son père n'est pas un monstre.

Sa vision du monde se partage entre amis et ennemis. Susceptible, elle est fragile à la critique. D'humeur changeante, elle n'a pas peur du scandale, elle peut y trouver un certain plaisir. Son moteur, c'est la révolte. Il lui faut toujours un ennemi.

Jean-Luc Mélenchon, l'indigné susceptible

Ses réactions disproportionnées masquent des déficits personnels : anxiété et mauvaise estime de soi. Il se sent incompris, rejeté par une part de la société. Il a une perception négative des situations. Son côté extraverti et ambitieux compense. Il s'entoure d'amis qui le poussent à agir pour que les choses changent. Son engagement politique correspond à une volonté de reprendre le contrôle, qui trouve sans doute sa source dans un double deuil : le divorce de ses parents et son départ de Tanger pour la Normandie.

Il a des réactions de colère vis-à-vis des sujets qu'il considère comme intellectuellement inférieurs ou qui ne lui reconnaissent pas un statut de dominant. Il ressent une irrépressible frustration quand les autres ne pensent pas comme lui. S'ajoute un versant susceptible avec une légère tendance à se croire victime d'attaques injustes.

Son indignation permanente le fait avancer autant qu'elle lui fait brûler de l'énergie. Ce qui peut vite conduire à l'épuisement, avec un risque accru de perte de contrôle.

Nicolas Sarkozy, le dominant émotionnel

Certains de ses traits sont à la limite du dysfonctionnement. Notamment l'instabilité émotionnelle, qui peut donner le pire comme le meilleur. C'est un narcissique compensatoire qui possède une grande capacité d'adaptation et de changement d'opinion. Ces profils compensent la perception plutôt négative qu'ils ont d'eux en se mettant continuellement en avant et en critiquant les autres. Sa communication non verbale traduit sa nervosité intrinsèque.

Vouloir dominer les autres semble inné chez lui, comme s'il souffrait d'une injustice originelle. Sauf vis-à-vis des femmes, auxquelles il est incapable de tenir tête. Il veut épater le monde, prouver qu'il est une personne extraordinaire. Se plier aux usages que lui impose la fonction présidentielle est une souffrance, il le vit comme de la soumission. Il crie, menace, intimide, mais ne "mord" presque jamais. C'est un faux dur.

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"Le diagnostic des psys" sur les candidats à l'élection présidentielle

dans Le Point n°2064 du 5 avril 2012, en kiosque et en 3D.

Pascal de Sutter Docteur en psychologie politique et professeur à l'université de Louvain laneuve, en Belgique.

"Dans la tête des candidats", avec Hélène Risser (Les Arènes, 2011).

Photo © Isabelle Simon / Sipa

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