Nouveaux défis

Michel et Jean, deux hommes d’âge moyen, sont relativement équilibrés et normaux. Un matin, tous deux s’éveillent avec d’étranges douleurs à la poitrine. Ils aboutissent à l’urgence. Heureusement, il s’agissait d’une fausse alerte, pour l’un comme pour l’autre. C’est un spasme musculaire qui aurait causé ces douleurs. Leur cœur est solide.

Michel retourne rapidement à sa vie normale et ou­blie l’incident. Cette douleur n’était qu’un écho sur l’écran radar. Jean, par contre, a changé. Il est aux prises avec des questions existentielles sur la vie et la mort. Obsédé par sa santé, il passe des heu­res chaque jour à pani­quer et à pleurer. Comment un même incidentpeut-il avoir des effets aussi radicalement opposés chez deux hommes apparemment normaux?

Probable ou possible
Il se trouve que Michel et Jean n’ont pas la même mentalité. Déjà avant l’incident, ils n’en­visageaient pas la mort du même œil. Toute sa vie, Michel a été capable d’établir des nuances, et il a toujours su qu’il pouvait mourir n’importe quand. En revanche, il sait aussi qu’être terrassé subitement, en ce qui le con­cerne, est peu probable à court terme. Cette certitude l’a aidé à passer à travers l’incident, qu’il résume en ces mots : «Mon heure n’était pas arrivée!» Et la vie continue.

Mais pour Jean, tout est blanc ou noir. Bien sûr, il a toujours su qu’il allait mourir un jour, mais cette idée lui semblait trop lointaine pour qu’il s’en inquiète. L’incident l’a donc ébranlé. Il a désormais conscience qu’il peut mourir à tout moment. Le fait qu’une mort subite ne soit pas très probable à ce stade de sa vie ne le rassure en rien. Son esprit ne fait pas de nuanc­es. Son monde en noir est blanc n’est plus que noir.

Une naïveté béate
Certaines personnes sont capables de considérer leur vie d’un œil probabiliste. Elles savent que des malheurs peuvent survenir, mais que, la plupart du temps, ils ne se produisent pas. Elles peuvent mettre les risques et les dangers en perspective, et s’en accommoder. Et puis, il y a les gens qui pensent d’une façon plus absolue. Pour eux, une chose est dangereuse ou elle ne l’est pas. Accepter un risque relatif n’est pas dans leur nature. Ils traversent la vie dans une naïveté béate, jusqu’à ce que survienne un événement qui les pousse vers l’autre extrême. Puis, ils se retrouvent plongés dans un monde où les malheurs sont réels et imminents.

Telle est la nature des nouveaux défis. Comme ils diffèrent totalement de ceux auxquels nous avons dû faire face dans le passé, ils peuvent nous révéler des traits de caractère dont nous ignorions jusqu’à l’existence.

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