L’INCONSCIENT ET SES MYTHOLOGIES (III)

Cette série de « billets » (six au total a priori) cherche à RÉSUMER le chapitre « l'inconscient et ses mythologies » de l'ouvrage Psychologie de la vie quotidienne de Jacques Van Rillaer (JVR) [1].

Aussi érudit [2] qu'agréable à lire, le chapitre en question resitue historiquement l'émergence de la notion d'inconscient.

Il expose également de nombreux aspects de l'évolution des connaissances sur le sujet, celles de la psychologie scientifique en particulier, souvent peu connu dans notre « beau pays » ; et pointe le « danger » d'invoquer cette notion à tout propos.

C'est peu de dire qu'au final, le concept d'inconscient en sort « dépsychanalysé » [3]...

Plan du billet :

Il est, par nature, calqué sur celui du chapitre.
Il comprendra donc le sous-chapitre suivant [4], plus particulièrement consacré aux circonstances de la naissance de la psychanalyse [5] (le numéro de sous-chapitre a été ajouté pour la clarté de la lecture ; il n’existe pas dans l’ouvrage) :

 

EVENEMENTS SANS SOUVENIRS, SOUVENIRS SANS EVENEMENTS

 

Pour expliquer les comportements, les hommes ont invoqué des facteurs aussi divers que des passions envoyées par des dieux et des démons, des influences astrologiques, des humeurs (la bile, le sang, la lymphe), la constitution, l'hérédité, les coutumes, le climat.

Une explication, aujourd'hui largement acceptée dans le monde occidental, réside dans l'histoire de l'individu. Des conditionnements subis dans le passé, en particulier durant l'enfance, détermineraient une large part, voire la totalité, des conduites présentes et futures (Montaigne, Descartes - cf. billet I - énonçaient déjà cette thèse). Certains auteurs ont été jusqu'à remonter à la période prénatale : le médecin français Antoine Le Camus (XVIIIe siècle) expliquait la peur violente du roi Jean Ier d'Angleterre pour les épées par le fait que sa mère, lorsqu’elle était enceinte de lui, avait assisté à un meurtre à l'aide d'une telle arme.

 

Même si on trouve chez des magnétiseurs du XVIIIe, des récits de guérisons suite à l’évocation de secrets pénibles, l'idée de l'utilisation thérapeutique du ressouvenir d'événements n'a été systématisée qu'au XIXe siècle : Moritz Benedikt, un neurologue autrichien (années 1860), élabore un traitement psychologique fondé sur l'exploration de secrets et d'événements traumatisants du passé.

À partir de 1864, Benedikt, chef du Service de neurologie de la policlinique générale de Vienne, a émis l'idée que l'hystérie est souvent causée par une perturbation psychologique de la vie sexuelle et non, comme on le pensait à l'époque, par un dysfonctionnement somatique de l'utérus ou de la sexualité. Il a ensuite développé la thèse que non seulement l'hystérie, mais tous les troubles mentaux et même certaines maladies physiques trouvent leur origine dans des « secrets pathogènes » (traumatismes sexuels de l'enfance, frustrations sexuelles ou affectives…). En conséquence, le rôle du médecin est d'aider le patient à mettre au jour cette « seconde vie », cachée « à l'intérieur du moi ».

Il fut un des tout premiers médecins à employer l'hypnose pour le traitement des troubles mentaux. Il croyait que cette pratique permettait de devenir « clairvoyant » et de se remémorer avec exactitude les événements oubliés d'un lointain passé… avant d’en devenir un adversaire déclaré, estimant cette technique propice aux suggestions, aux mystifications et jugeant ses résultats éphémères ; selon lui, l'exploration de la vie inconsciente doit s'effectuer à l'état de veille, en faisant preuve de « courage moral ».

La théorie et la pratique de Benedikt ont joué un rôle capital dans les conceptions de Joseph Breuer — à l'époque où celui-ci traitait sa célèbre patiente Anna O. —, de Freud et d'Adler.

Benedikt a publié une série de cas illustrant sa conception. Ellenberger, qui en donne un échantillon, note que rien ne ressemble plus aux observations cliniques de Benedikt que celles que Freud présentera, plus tard, dans les Études sur l'hystérie.

Des lecteurs de Freud peuvent s'étonner que celui-ci n'ait pas mentionné plus souvent ce précurseur d'idées centrales de la psychanalyse (après 1895, un seul hommage de Freud...) : entre autres pour entretenir « la légende de l'originalité absolue » (Ellenberger) de Freud et de la psychanalyse (voir « Annexes », § 1). Si ses fidèles ont soigneusement entretenu ce mythe, Freud lui-même a tout fait pour paraître un génie, qui a réalisé des découvertes révolutionnaires pour l'humanité (il n'hésita pas à se comparer à Copernic et à Darwin).

 

 

La légende d'Anna O.

 

Aujourd'hui, pour beaucoup d'Occidentaux, il n'est guère douteux que le ressouvenir des événements à l'origine d'un trouble mental est la condition nécessaire et suffisante pour la guérison de ce trouble. Cette idée, promue par Benedikt, a été reprise par son ami Joseph Breuer en 1880, au moment de traiter une Viennoise de 21 ans, Bertha Pappenheim, dont il publiera l'histoire sous le nom d'Anna O (cas qui a joué un rôle déterminant — via le freudisme — pour la diffusion de la croyance dans l'efficacité thérapeutique de la remémoration).

 

Anna O. avait consulté Breuer pour une toux opiniâtre, que celui-ci qualifia d'hystérique, avant que d'autres symptômes apparaissent. Breuer s'est alors occupé intensément de la patiente (décembre 1880-juin 1882) et des troubles de plus en plus théâtraux se sont développés : états de stupeur, refus d'alimentation et de boisson, périodes de mutisme et de surdité hystériques, crises d'angoisse, paralysie de différentes parties du corps, anesthésies diverses, troubles du langage (Anna ne pouvait plus comprendre ni parler sa langue maternelle et ne s'exprimait qu'en anglais), hallucinations, dédoublement de la personnalité… À l'époque, le diagnostic ne laissait guère de doute : un beau cas d'hystérie.

 

Breuer était spécialiste de médecine interne, et son incursion dans le domaine de la psychopathologie fut de courte durée, malgré la réalisation de cette étonnante psychothérapie.

Durant un an et demi, il a passé plus de mille heures en sa compagnie, une durée qui annonce celle des cures freudiennes. En 1882, il parlera de la patiente à Freud - qui ne l'a jamais rencontrée. La publication du cas ne se fera qu'en 1895, dans l'ouvrage Études sur l'hystérie, écrit par Breuer et Freud.

 

Idées-clés :

 

Anna O. se mettait elle-même en état d'hypnose.

Breuer l'invitait alors à remonter dans le passé pour découvrir le point de départ de ses symptômes. L'exemple par excellence de cette méthode est l'analyse d'une « impossibilité » temporaire de boire. En plein été, durant six semaines, Anna disait ne pouvoir s'abreuver que par des fruits, notamment des melons. En état hypnotique, elle raconta que sa répugnance avait commencé après avoir vu le petit chien de sa dame de compagnie boire dans un verre d'eau. À ce moment-là, voulant rester polie, elle n'avait rien dit. Une fois terminé son récit à Breuer, elle demanda à boire et but sans difficulté. « Ensuite le trouble disparut à jamais. »

Breuer en déduit : les somatisations hystériques sont des conversions somatiques d'émotions qui n'ont pu s'éliminer par la voie normale de l'action. Il a estimé que le traitement de ce type de symptômes, voire de tous les troubles névrotiques, doit passer par la prise de conscience et la décharge (Entladung) d'affects bloqués. Il a appelé son procédé la « méthode cathartique ». La patiente elle-même l'avait baptisé « talking cure », la cure par la parole.

 

Dans sa publication, Breuer affirme que les symptômes disparurent les uns après les autres jusqu'à ce qu'elle retrouve « une parfaite santé. »

 

Freud, dans toutes les présentations qu'il fera du prototype de la cure psychanalytique, affirmera que « tous » les symptômes d'Anna O. disparurent grâce au rappel de souvenirs accompagnés des émotions qui s'y trouvaient liées.

Le lecteur des Études sur l'hystérie peut s'étonner :

-        que Breuer, qui avait réussi à traiter avec un succès total un cas aussi grave que celui d'Anna O., n'ait pas continué à pratiquer la psychothérapie.

-        du délai entre cette impressionnante guérison et sa publication : treize ans.

-        de lire, dans l'autobiographie de Freud, que c'est Freud qui a eu l'idée de publier le cas et que lorsqu'il en fit la proposition à Breuer — qui avait cependant déjà une longue pratique de publications scientifiques — celui-ci « commença par se défendre violemment ». N'est-ce pas étrange ?

 

En 1953, Ernest Jones, ami et biographe de Freud, évoquait ce qui était devenu un secret de polichinelle dans le milieu freudien : « L'état de la pauvre malade ne s'améliora pas autant que le laisserait supposer l'observation écrite de Breuer. (...) Un an après qu'il eut cessé de la soigner, Breuer confia à Freud qu'elle était tout à fait détraquée, et qu'il lui souhaitait de mourir et d'être ainsi délivrée de ses souffrances. »

 

Ellenberger, le célèbre historien de la psychiatrie, a voulu faire toute la clarté sur le cas princeps de la cure psychanalytique et a mené une longue enquête ; il a retrouvé au Sanatorium Bellevue, à Kreuzlingen, les rapports psychiatriques relatifs à cette patiente. Les documents montrent incontestablement que le récit publié par Breuer — et que Freud ne cessera de répéter — est une tromperie parfaitement consciente. Dans une note à ses confrères, Breuer écrit qu'à la fin de son traitement, alors qu'il pratiquait chaque soir la « cure par la parole », l'état de la patiente, « pour des raisons inexplicables », s'était aggravé.

Anna O. a fait de longs séjours dans cette clinique suisse : en 1882, de 1883 à 1884, en 1884, en 1885 et en 1887. La lecture des archives qui la concernent, ignorées pendant près de quatre-vingt-dix ans, a conduit Ellenberger à devoir conclure : « Le «prototype d'une guérison cathartique» ne fut ni une guérison ni une catharsis. Anna O. était devenue une morphinomane grave qui avait conservé une partie de ses symptômes les plus manifestes. » (Breuer avait prescrit de la morphine au cours de son « traitement par la parole », un détail passé sous silence dans les Études sur l'hystérie).

 

Séduction réelle, fantasme ou suggestion ?

 

Quand Freud commence à pratiquer la psychothérapie, en 1886, il utilise la méthode de Benedikt et de Breuer : retrouver les événements, cachés ou oubliés, censés être à l'origine des troubles. Le contenu de ses exposés de 1895 et 1896, peut se résumer par la phrase : « Quel que soit le symptôme d'où l'on a pris son départ, on finit immanquablement par parvenir au domaine de l'expérience sexuelle » Pour lui, l'expérience sexuelle est aux névroses ce que le bacille de Koch est à la tuberculose.

À cette époque, Freud répartit l'ensemble des troubles dits « névrotiques » en quatre catégories :

 

- l'hystérie,

- la névrose obsessionnelle,

- la neurasthénie

- la névrose d'angoisse.

 

Selon lui, les deux dernières sont causées, dans tous les cas, par des désordres actuels de la vie sexuelle, raison pour laquelle il les nomme « névroses actuelles ». La neurasthénie - une entité clinique qui correspond plus ou moins à ce que l'on appelle aujourd'hui « syndrome de fatigue chronique » et « trouble dysthymique » - est toujours le résultat de la masturbation ou de « pollutions spontanées ». La névrose d'angoisse - aujourd'hui « trouble panique » et « trouble d'anxiété généralisée » - est toujours l'effet de frustrations sexuelles, le plus souvent le coït interrompu. D'autre part, Freud désigne par « psychonévrose » deux troubles qu'il explique par un processus psychologique qui remonte à l'enfance : l'hystérie, toujours produite par le refoulement du souvenir d'une séduction sexuelle subie dans la petite enfance, et la névrose obsessionnelle, toujours la conséquence du refoulement du souvenir d'une expérience sexuelle précoce, qui a provoqué du plaisir et ensuite de la culpabilité.

Notons que, pour Freud, les expériences sexuelles de la petite enfance ne sont pas automatiquement pathogènes : pour que se développent l'hystérie ou la névrose obsessionnelle, il faut nécessairement que ces expériences aient été refoulées et que leur souvenir soit devenu totalement inconscient ! Freud affirme sans hésitation qu'aucun de ses patients ne se souvenait spontanément de scènes de séduction, mais que tous avaient été guéris dès qu'il leur avait fait prendre conscience de ces souvenirs refoulés, après énormément de résistances, d'indignation et d'incrédulité.

Lorsque Freud expose ces conceptions à des collègues, ceux-ci se montrent sceptiques quant au caractère universel de l'explication sexuelle. Ainsi Richard von Krafft-Ebing - le professeur de psychiatrie de l'université de Vienne et l'auteur d'un célèbre ouvrage de sexologie, Psychopathia Sexualis, paru en 1886 - déclare, au terme d'un exposé de Freud, que la sexualité joue certes un grand rôle dans l'étiologie des névroses, mais que Freud se trompe en généralisant à tous le cas. Un autre collègue affirme que d'autres facteurs (surmenage) peuvent également jouer. Freud répond sans hésiter qu'il a réussi à découvrir le facteur sexuel dans tous ses cas, sans aucune exception. Il affirme avoir la certitude absolue (absolute Sicherheit) que la sexualité est la pièce manquante du puzzle de la psychopathologie.

Les confrères de Freud sont choqués par son « monoïdéisme » (et non par l'évocation de la sexualité pour expliquer une partie des troubles névrotiques, idée déjà largement diffusée dans les milieux médicaux - voir « Annexes », § 2). Ils sont échaudés par la bévue de Charcot : les grandes crises d'hystérie « typiques », longuement décrites par que le maître de la Salpêtrière (années 1880), avaient été produites par ses propres attentes et suggestions, chez quelques patientes particulièrement douées pour se donner en spectacle. von Krafft-Ebing pense que les « aveux » des patients ont été produits par des suggestions du thérapeute : il qualifie sa théorie de « conte de fée scientifique ».

Freud reconnait lui-même exercer une pression considérable sur ses patients : lorsqu'ils souffrent d'hystérie et d'obsessions, il les presse de retrouver des « souvenirs de séduction » ; lorsqu'ils souffrent de « névroses actuelles », il les pousse à avouer leurs « désordres » sexuels du moment (masturbation, coït interrompu). Il écrit par exemple, au sujet des « séductions subies dans la première enfance » : « Les malades ne racontent jamais ces histoires spontanément, ni ne vont jamais dans le cours d'un traitement offrir au médecin tout d'un coup le souvenir complet d'une telle scène. On ne réussit à réveiller la trace psychique de l'événement sexuel précoce que sous la pression la plus énergique du procédé analyseur et contre une résistance énorme, aussi faut-il leur arracher le souvenir morceau par morceau. » Il précise ailleurs que, « dans la plupart des cas, les souvenirs n'étaient retrouvés qu'après plus de cent heures de travail. »

On sait aujourd'hui que Freud a menti quant au nombre de patients qu'il avait traités, comme sur beaucoup d’autres points (voir « Annexes », § 3). Ce qui nous occupe ici c'est la facilité avec laquelle une théorie psychologique peut se confirmer, ainsi que la possibilité de suggérer des « souvenirs » d'événements qui ne se sont pas produits. Freud expliquait à ses patients, souffrant d'hystérie ou d'obsessions, qu'ils ne guériraient que s'ils déterraient des souvenirs sexuels complètement refoulés et il prenait tout le temps nécessaire pour que les patients se fassent à cette idée. Des patients — Freud écrit jusqu'en 1897 « tous mes patients » — finissaient par « se remémorer ».

En septembre 1897, Freud est désemparé. Il écrit à Fliess : « Je ne crois plus à ma neurotica [théorie des névroses] [...] Maintenant je ne sais plus où j'en suis [...] Garder la sérénité, tout est là. J'aurais lieu de me sentir très mécontent. Une célébrité éternelle, la fortune assurée, l'indépendance totale, les voyages, la certitude d'éviter aux enfants tous les graves soucis qui ont accablé ma jeunesse, voilà quel était mon bel espoir. Tout dépendait de la réussite ou de l'échec de l'hystérie. Me voilà obligé de me tenir tranquille, de rester dans la médiocrité, de faire des économies, d'être harcelé par les soucis. (21.09.97) »

Freud dit abandonner l'idée que l'hystérie est toujours le résultat de sévices sexuels de la première enfance : malgré tous ses efforts, certains patients maintiennent qu'ils n'ont aucun souvenir d'avoir été sexuellement abusés, d’autres ne guérissent pas malgré la découverte de sévices « refoulés » ; « il n'y a dans l'inconscient aucun indice de réalité permettant de distinguer l'une de l'autre la vérité et la fiction investie d'affect ». Il ajoute alors qu'une solution reste possible : les récits de séduction sont des scènes imaginées, des fantasmes.

Pour la grande majorité des freudiens, la psychanalyse commence à ce moment précis : lorsque Freud remplace la théorie de la séduction par celle du fantasme, lorsqu'il conçoit que l'essentiel n'est pas la « réalité matérielle » du passé, mais la « réalité psychique », les souvenirs d'événements imaginés par les patients, dans la petite enfance, au cours de leurs activités auto-érotiques.

 

Jouant lui-même jusqu’à la fin de sa vie sur deux tableaux, Freud a toujours continué à chercher des événements de l'enfance (cf. ses exposés de cas – Dora, l'Homme aux Loups). En 1914, il ambitionne encore de « combler les lacunes de la mémoire » grâce à l'interprétation des résistances, même s’il explique que la technique psychanalytique n'est plus celle de Breuer - provoquer la catharsis d'émotions bloquées grâce à l'hypnose. Dans son dernier article sur cette question (1937), il écrit encore : « Les symptômes sont des substituts d'oublis ». Chaque fois que des témoignages viennent contredire formellement ses découvertes « archéologiques », il rappelle que l'important ce sont les fantasmes inconscients et non la réalité des faits (Cette« dialectique » rend « irréfutable » sa théorie de la causalité sexuelle des troubles mentaux. Si l'on accepte la « logique » freudienne, il est impossible d'imaginer un seul cas qui pourrait remettre en question cette théorie, ni même la faire évoluer. La théorie freudienne est séduisante, elle n'est pas scientifique.

 

ANNEXES :

 

Ces trois paragraphes (§) constituent respectivement les notes 63, 77 et 82 du chapitre. Les deux premières donnent de nombreuses références de recherches historiques sur la genèse de la psychanalyse. La dernière donne une bibliographie qui détaille quelques uns de ce qu’il faut bien appeler des mensonges de Freud, même si « certains chercheurs lui ont trouvé des excuses ».

 

§. 1. (note 63) : Ellenberger H., À la Découverte de l'Inconscient, trad., éd. Simep, 1974, p. 464 et passim (éd. anglaise : 1970). De nombreux spécialistes de la pensée freudienne ont confirmé tout à fait le point de vue développé par Ellenberger en 1970. Voir par exemple Sulloway F., Freud, Biologist of The Mind : Beyond the Psychoanalytic Legend, trad., Freud, Biologiste de l'esprit [le titre de la traduction a été amputé, peut-être pour moins effrayer les acheteurs français], Fayard, trad., 1981, 620 p., rééd. 1998. — Brès Y., Critiques des Raisons psychanalytiques, Paris, P.U.F., 1985, p. 142. — Webster R., Why Freud was wrong. Sin, Science, and Psychoanalysis. New York, Harper Collins Basic Books, trad., Le Freud inconnu. L'invention de la psychanalyse, Paris, Exergue, 1998. — Crews F.C., Unauthorized Freud. Doubters Confront a Legend, New York, London, Viking, 1998.

 

§. 2. (note 77) : Laplassotte F., « Sexualité et névrose avant Freud : une mise au point », Psychanalyse à l'Université, 1977, 3, p. 203-26.

 

§. 3. (note 82) : Par exemple, en 1898, alors même qu'il se plaint régulièrement à Fliess de manquer de patients, Freud publie un article où il affirme avoir traité 200 neurasthéniques, qui lui ont montré que « dans tous les cas, sans exception » la cause du trouble était « la masturbation excessive ou des pollutions accumulées » (« La sexualité dans l'étiologie des névroses », trad., Œuvres complètes, P.U.F., vol. III, p. 215-40)… Il est évident qu'il ment. En 1974, Frank Cioffi, professeur à l'université de Kent à Canterbury, publiait un article au titre et au contenu irrévérencieux : « Freud était-il un menteur ? » ( « Was Freud a liar ? », The Listener, 7 févr. 1974, p. 172-74, rééd. dans Crews F., éd., Unauthorized Freud, New York, Viking, 1998, p. 34-42). Depuis, des historiens de la psychiatrie et de la psychanalyse ont fait de plus en plus de découvertes et de révélations. Que Freud ait souvent menti pour apparaître comme le créateur d'une psychologie révolutionnaire est aujourd'hui parfaitement démontré. Celui qu'on a appelé un « maître du soupçon » est assurément un maître du mensonge. Certains chercheurs lui ont trouvé des excuses. Par exemple Webster termine son imposant ouvrage en disant notamment : « En dépit de son attitude parfois moins que scrupuleuse vis-à-vis de la vérité, il reste que, si Freud a voulu persuader ses contemporains d'accepter la psychanalyse, c'était pour nulle autre raison que sa propre foi en elle. En ce sens, la théorie psychanalytique n'est pas plus une escroquerie que ne le sont le christianisme, l'Islam, le judaïsme ou tout autre système de croyance religieuse. » (Le Freud inconnu. L'invention de la psychanalyse, trad., éd. Exergue, 1998, p. 490). D'autres chercheurs, surtout parmi ceux qui avaient commencé par croire sans réserve les Ecrits freudiens, ont réagi à la mesure de leurs déceptions. Ainsi Han Israëls, professeur d'histoire de la psychologie à l'université d'Amsterdam, a publié un ouvrage au titre sans équivoque : De Weense kwakzalver. Honderd jaar Freud en de freudianen. [Le charlatan de Vienne. Cent ans de freudisme et de freudiens], Amsterdam, Bert Bakker, 1999. Sur les fraudes freudiennes, le lecteur anglais a l'embarras du choix. Particulièrement éclairante est une anthologie de vingt textes rassemblés par Frederick Crews (université Berkeley), Unauthorized Freud. Doubters Confront a Legend, New York London, Viking, 1998, 302 p. En français, le travail le mieux documenté est, à ce jour, celui de Jacques Bénesteau (université de Toulouse-Rangueil), Mensonges freudiens, Belgique, éd. Mardaga (diffusé en France par SOFEDIS), 2002, 400 p.

 

NOTES :

[1] ­ Odile Jacob (2003), 336 pages (pp. 149 à 222, pour le chapitre résumé).

[2] ­ Ce seul chapitre, qui compte 74 pages, comporte 170 (cent soixante-dix) notes de bas de pages !

[3] ­ La « dépsychanalysation » de ce concept n'est pas anodine dans notre pays où tout élève de Terminale reçoit un enseignement de philosophie dans lequel, comme le rappelle plaisamment ici (p. 3) l'éditorialiste de « Côté Philo » : « Aucune autre notion (au programme que celle d'inconscient, NDJLR) ne sert de prête-nom à un auteur. » !
Cette série de billets permettra, je l'espère, de rétablir un peu de faits dans un monde largement peuplé de légendes... et de mythologies.

[4] ­ Les 11 sous-chapitres s'intitulent :

I. L'INCONSCIENT, IL Y A PLUS DE 300 ANS
II. L'INCONSCIENT À L'AUBE DE LA PSYCHOLOGIE SCIENTIFIQUE
III. EXEMPLES DE RECHERCHES SCIENTIFIQUES SUR L'INCONSCIENT AU XX
ème SIÈCLE
IV. BUVEZ COCA-COLA : ACHETEZ MES CASSETTES
V. EVENEMENTS SANS SOUVENIRS, SOUVENIRS SANS EVENEMENTS
VI. FORCE ET FRAGILITE DE LA MEMOIRE
VII. L'EPIDEMIE DES FAUX SOUVENIRS D'ABUS SEXUELS
VIII. L'EXPLORATION DE VIES ANTERIEURES
IX. LES ENLEVEMENTS PAR DES EXTRATERRESTRES
X. POURQUOI IMAGINONS-NOUS DES SOUVENIRS ?
XI. DU DANGER D'INVOQUER L'INCONSCIENT

 

[5] ­ Les précisions données dans ce sous-chapitre, en particulier dans le paragraphe « La légende d'Anna O. », le rendaient particulièrement difficile à résumer sans trahir l’ouvrage ; ce qui explique de nombreuses « reprises »… et la longueur du billet.

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