Le talent est-il plus déterminant que le travail?

 Bébé jouant du piano, 20 avril 2009. Ernst Vikne via Flickr CC License by

Comment les gens deviennent bons en science, en musique ou
en sport? Est-ce de l’inné ou de l’acquis?

Ces questions ont soulevé pendant
longtemps d’intenses débats en psychologie. Et contrairement à certains
spécialistes qui insistent sur le rôle déterminant de la pratique et du travail,
David  Z. Hambrick et Elizabeth J. Meinz,
deux professeurs de psychologie, soutiennent dans un article du New York Times que
le talent et l’intelligence ont un impact bien plus marquant sur nos actions
.

Les deux chercheurs rappellent qu’il y a moins de vingt ans,
une étude pionnière dirigée par le psychologue K. Anders Ericsson de l’université
de Floride a montré que bien jouer de la musique relevait surtout du nombre d’heures
de pratique. Ainsi a-t-il remarqué avec ses collègues qu’à l’âge
de 20 ans, les meilleurs étudiants du département de musique de l’université de
Floride avaient accumulé pas moins de 10.000 heures de répétition, contre 8.000 pour les élèves jugés
bons mais pas excellents et 5.000 heures pour les moins performants.

Comme le soulignent David  Z. Hambrick et Elizabeth J. Meinz, ces
résultats fondateurs ont été suivis par de nombreuses études «enthousiastes» allant dans le même sens:
ce qui sépare les meilleurs des bons c’est l’acharnement au travail et la
détermination. Malcolm Gladwell en tire d’ailleurs la même conclusion quand il
résume l’importance des recherches d’Ericsson dans son livre Outliers:

«La pratique, ce n’est
pas ce que vous faites une fois que vous êtes bon, mais ce que vous faites pour
devenir bon.»

De la même manière, Geoff Colvin dans son livre Le talent est surévalué, distingue
justement pour mesurer la pertinence du QI, la performance dans un cadre répété
et habituel et la performance réalisée qu’une seule fois:

«Le QI est un
indicateur convenable de performance pour une tâche qui n’est pas familière,
mais une fois qu’une personne fait le même travail depuis quelques années, le
QI ne prédit pas grand-chose, ou même rien concernant la performance.»

Mais selon les deux auteurs de l’article du New York Times, ces affirmations ne
correspondent pas exactement à «ce que
dit la science»
. De plus récentes recherches montrent en effet que les
capacités intellectuelles ont un rôle déterminant pour réussir dans de nombreux
domaines.

David Lubinski et Camilla Benbow de l’université de Vanderbilt dans le Tennessee ont
ainsi suivi les trajectoires scolaires de plus de 2.000 personnes qui ont obtenu
les meilleurs scores au SAT à 13 ans (les 1% les meilleurs). Et ils remarquent
qu’en comparaison des 9% les meilleurs, les premiers 1% ont trois à cinq fois
plus de chance d’avoir un doctorat, d’écrire un livre ou de publier ou un
article dans une revue scientifique.

Les deux auteurs évoquent aussi leurs propres résultats qui
reposent sur l’analyse de ce qu’ils appellent la capacité liée à la «mémoire de travail». Selon eux, cette
qualité intellectuelle est innée. Or c’est elle qui fait la différence entre,
par exemple, deux pianistes ayant la même expérience mais pas la même
intelligence.

Cet article du New York Times a été vivement critiqué par
Gizmodo, un site spécialisé dans l’actualité des innovations technologiques. Le site déplore en effet le fait que les
deux psychologues cherchent à décourager tous ceux qui essayent d’entreprendre
 «en
travaillant vraiment dur»,
et souligne que la notion de «talent» ne se limite pas à la
génétique, et donc à l’inné.

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