La discipline se constitue en association

Les psychologues n’en peuvent plus de leur situation. Cela fait des mois qu’ils dénoncent la «non-reconnaissance» de la part de la famille scientifique marocaine pour la psychologie, en tant que discipline dont l’objectif est de permettre une compréhension de l’être humain dans ses manières d’agir, d’être et de penser.

Pour exprimer leur mécontentement, ils ont décidé de se mobiliser pour redonner à la psychologie la valeur qui leur est due. A cet effet, ils ont «remis en marche» la Société marocaine de psychologie qui a été créée en 1984 et a accompli diverses avancées, selon les psychologues, que ce soit au niveau déontologique ou juridique. Cependant, cette société s’est retrouvée en instance depuis 1995. Elle a repris ses activités dernièrement. En effet, les psychologues ont tenu une assemblée générale le 17 décembre dernier à Rabat. Au cours de cette assemblée, les membres présents ont procédé à la discussion de la situation de la psychologie au Maroc, en revisitant l’état des lieux et lui redéfinissant des objectifs scientifiques et professionnels, l’approbation des rapports moraux et financiers présentés par l’ancien bureau, ainsi que la démission de ses membres et les modifications apportées aux statuts de l’association et l’élection du nouveau Bureau.

«L’objectif de la remise en service de cette association est l’organisation et la restructuration de la discipline. Il s’agit d’un projet prometteur. La psychologie ne doit plus être une question individualiste, nous devons tous nous réunir et collaborer pour défendre cette branche scientifique et lui donner la place qu’elle mérite comme il est le cas à l’échelle internationale», assure Abdelkarim Belhaj, psychologue et secrétaire général de l’association. Avant de clôturer les travaux de cette réunion, l’assemblée a constitué les commissions suivantes : Métier de psychologue; Formation et recherche; Communication, société et partenariat.
A la fin, le bureau s’est engagé à finaliser l’organisation de l’association et l’élaboration d’un programme de travail, suite aux proposions et projets discutés lors de cette assemblée. «Nous avons commencé notre travail par clarifier nos objectifs. Le plus important d’entre eux est, sans aucun doute, la situation du psychologue au Maroc.

Dénoncer les «faux» psychologues

Le statut juridique du psychologue est en effet inexistant. Le psychologue est confiné dans un cadre d’assistant du psychiatre et malheureusement ce genre de disparités existe même au sein de l’université», précise Belhaj. Et d’ajouter : «C’est la raison pour laquelle nous allons mettre en place une politique de formation pour réunir les professionnels de la discipline autour d’une visibilité plus claire de la branche pour qu’ils puissent pratiquer dans les règles de l’art et surtout pour que cette visibilité soit cohérente chez les chercheurs, les enseignants et même les praticiens».

Autres objectifs de cette association qui compte déjà 70 membres dont plus des 2/3 sont des professeurs, c’est engager des activités qui auront pour finalité de promouvoir la discipline et dénoncer les «faux» psychologues. «Nous n’avons plus le droit de garder le silence. Il faut redonner confiance à la psychologie et mettre les points sur les «i». Le but est de définir des normes et des règles pour l’exercice de la profession, par exemple, exiger une formation de 7 ans plus 2 ans de stage, pour pouvoir ouvrir un cabinet de psychologie», indique Abderrahim Emran, psychologue et membre de l’association, qui accuse les médias d’envenimer la situation de la psychologie au Maroc. «Les médias marocains se sont aussi mis à la tendance psy, mais ils ne prennent pas tous la peine de s’assurer de la formation et des compétences dudit spécialiste, qui peut n’être qu’un charlatan», affirme-t-il.

Même son de cloche chez Belhaj : «Notre devoir est de dénoncer tous les prétentieux qui se prétendent psychologues sans avoir aucun diplôme. Nous les connaissons, mais nous avions les bras liés. Aujourd’hui, grâce à l’association, nous pouvons agir et engager des démarches de sensibilisation pour parer à l’influence de ces prétendus psychologues», souligne le secrétaire général.
Pour rappel, le statut de la psychologie a déjà fait débat après la publication du rapport du CNDH (Conseil national des droits de l’Homme), sur la santé mentale. Un rapport qui met la lumière sur l’état des établissements hospitaliers accueillant les malades mentaux.

Toutefois, les psychologues lui avaient reproché de ne pas évoquer l’apport de la psychologie dans ce domaine. «La psychologie a été écartée délibérément du champ disciplinaire dans lequel elle a élu domicile depuis son avènement dans l’ordre des sciences, en lui méconnaissant les qualités dont elle fait preuve dans la formation et dans la recherche. Elle se retrouve, maintenant, chassée de ce champ tel qu’il a été entretenu et animé à l’université depuis longtemps», estime Belhaj.


Qu’est-ce que la psychologie ?

Étymologiquement, psychologie signifie : science de l’âme. Cette science a connu ses débuts au XVIe siècle, son développement au XIXe siècle et son plein essor au XXe siècle. Son objet est l’étude du comportement humain sous tous ses aspects psychiques, normaux ou pathologiques. La psychologie est donc l’étude scientifique des faits psychiques et des comportements. De ce fait, elle joue plusieurs rôles qui s’opèrent autour de trois axes principaux : le conseil, la thérapie et la formation. Divisée en de nombreuses branches d’étude, aussi bien théoriques que pratiques, la psychologie a des applications thérapeutiques individuelles, collectives, sociales, parfois même politiques et morales.
Par ailleurs, ayant pour objectif l’investigation de la structure et du fonctionnement du psychisme, elle s’attache donc à décrire, évaluer et expliquer les processus mentaux dans leur ensemble, en prenant en compte les manifestations de la subjectivité.


Repères
  • La Société marocaine de la psychologie a connu un grand mouvement d’adhésion depuis l’annonce de sa création, ce qui rassure les membres du bureau qui visent à mobiliser toutes les compétences de la discipline.
  • L’Association organise une journée d’étude et de réflexion en janvier 2013. Le but sera d’évaluer l’état des lieux et de mettre en place une commission qui sera chargée de rédiger le projet des statuts.

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