La pensée intuitive est rapide tandis que la pensée analytique est plus lente et exige plus de ressources. La pensée analytique intervient lorsque la pensée intuitive est insuffisante pour appréhender une situation.
La tendance à remettre en question les pensées intuitives et à réfléchir analytiquement est souvent mesurée par le Test de réflexion cognitive (faites le test).
Plusieurs études récentes, rapportent les auteurs, ont souligné que les gens ont tendance à prendre des décisions irrationnelles et que les efforts de raisonnement ne servent souvent qu'à justifier ou rationaliser des croyances, des intuitions ou des actions déjà en place. Ces recherches ont inspiré un courant dit intuitionniste en psychologie qui considère que l'intuition, et non pas la raison, est la clé pour comprendre les croyances et les comportements.
Le psychologue Gordon Pennycook et ses collègues (1) de l'Université de Waterloo (Ontario, Canada) ont réalisé une revue des études portant sur les liens entre ces deux types de pensée, mesurés au moyen du Test de réflexion cognitive (TRC), et divers aspects du fonctionnement psychologique.
Croyances
Les croyances et visions du monde sont-elles au moins partiellement déterminées par la tendance à la réflexion ou les facteurs sociaux et culturels annulent-ils entièrement son impact ?
Trois études indépendantes, rapportent les auteurs, ont montré qu'une plus grande tendance à utiliser la pensée analytique, telle que mesurée par le TRC, était liée à moins de croyances religieuses.
D'autres études montrent la même corrélation en ce qui concerne les croyances dans les phénomènes paranormaux (ex. astrologie), dans les théories conspirationnelles irrationnelles et dans les pseudosciences (ex. homéopathie).
Moralité
Des chercheurs tels que Kohlberg ont souligné le rôle du raisonnement dans le développement du jugement moral alors que des travaux plus récents ont plutôt mis l'accent sur le rôle de l'émotion et de l'intuition (voyez : Débat en psychologie : les valeurs de la droite sont-elles morales ?).
Des études, recensées par les auteurs, montrent que les personnes utilisant davantage le raisonnement analytique ont une plus grande tendance à remettre en question leurs premières réactions émotionnelles lors de jugements moraux et à juger selon les conséquences des actes (morale utilitariste).
Valeurs morales
Alors que des études ont montré que les personnes qui ont des allégeances politiques de droite sont notamment plus susceptibles de prioriser les valeurs de loyauté au groupe (qui impliquent souvent le respect de l'autorité et le conservatisme pour maintenir l'appartenance) plutôt que des valeurs telles que l'égalité et le soin des autres, les études recensées par les auteurs montrent que les gens qui ont une plus grande disposition à la pensée analytique placent la loyauté moins haut dans la hiérarchie des valeurs.
Prosociabilité
Des études ont suggéré que les gens ont tendance à être intuitivement coopératifs et peuvent remplacer ces intuitions pour des raisons égoïstes via un raisonnement analytique.
Selon cette hypothèse, les gens apprennent des stratégies de coopération à travers les interactions sociales. Les stratégies les plus efficaces deviennent intuitives par le renforcement positif. La pensée analytique est alors nécessaire pour s'adapter et modifier ces heuristiques dans des situations sociales atypiques.
Une étude a montré que la disposition à penser analytiquement peut supporter les stratégies coopératives dans des jeux économiques si elles augmentent la récompense pour une autre personne à un faible coût pour l'individu (position légèrement altruiste, mais pas complètement égalitaire ni malveillante).
Les personnes analytiques ne sont pas simplement cupides ; elles sont plutôt capables d'évaluer les compromis plus complexes entre l'intérêt personnel et les préoccupations altruistes comparativement aux personnes intuitives, résument les auteurs.
L'ensemble de ces résultats indique que la propension à penser de manière analytique a des conséquences majeures pour la psychologie individuelle, concluent les auteurs.
(1) Jonathan A. Fugelsang et Derek J. Koehler.
Psychomédia avec source : Current Directions in Psychological Science.
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