Grenoble | Les jeux vidéo sont-ils vraiment dangereux?

Menée par le laboratoire interuniversitaire de psychologie de l’Université Pierre-Mendès France à Grenoble (LIP), l’étude publiée dans la revue scientifique de renommée internationale, le Journal of Experimental Social Psychology, est unique en France. Unique car pour la première fois dans l’Hexagone, elle prouve que l’usage de jeux vidéo violents engendre des pensées hostiles, elles-mêmes génératrices de stratégies agressives. Autrement dit, explique Laurent Bègue*, le professeur de psychologie sociale qui dirige ce laboratoire, « les jeux vidéo violents constituent un véritable facteur de risque violent ».

« Les 136 participants, femmes et hommes confondus qui n’avaient pas de rapports particuliers avec ce genre de pratique, ont démontré que l’utilisation du produit culturel le plus vendu au monde n’était pas un loisir anodin, loin de là ! », explique ce spécialiste des comportements agressifs. « Certes, les effets ne sont pas spectaculaires (quelqu’un qui sort d’une séance n’a pas forcément envie de tuer ou de blesser un individu !), mais ces effets n’en sont pas moins réels. On note ainsi très clairement une augmentation de l’irritabilité, mais aussi une hausse des agressions verbales et des petits comportements brutaux. »

« Ils ont davantage tendance à infliger des “coups” de décibels à leurs pseudo- adversaires »…

Pour en arriver à cette conclusion, l’équipe de Laurent Bègue a notamment utilisé la fameuse méthode du choc sonore. Une conclusion sans équivoque quand elle a constaté que les protagonistes qui jouaient à des jeux vidéo violents (d’autres” cobayes” étaient sur des jeux dits classiques, comme des simulations de course automobile, mais provoquant le même niveau d’excitation nerveuse) avaient davantage tendance à infliger des “coups” de décibels à leurs pseudo-adversaires… Et même des coups particulièrement intenses et longs…

« Vingt minutes suffisent pour avoir envie de faire mal après », assure Laurent Bègue qui estime que la généralisation de ces jeux vidéo « n’est pas sans conséquence : l’augmentation du niveau moyen d’insensibilité à la souffrance provoquée par ces jeux est sans doute pour beaucoup dans l’ambiance agressive et l’agitation que les enseignants notent dans les établissements scolaires».

Se défendant de stigmatiser ces jeux vidéos dont il salue par ailleurs « la virtuosité technique et l’incroyable réalisme », Laurent Bègue lance toutefois une mise en garde : « Il faut arrêter de croire que ces jeux vidéo servent à purger la violence que l’on peut éventuellement avoir en soi. Cette hypothèse paraît séduisante mais elle est erronée. Notre société devrait plutôt s’inquiéter.

Car personne n’est à l’abri de ce genre de comportements violents ».

* Laurent Bègue est aussi l’auteur d’un essai intitulé “Psychologie du bien et du mal”(Odile Jacob, 355 p., 23,90 €).

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