Fête des mères 2015 : Ressemble-t-on forcément à sa mère? La …


FÊTE DES MÈRES - "On dirait ta mère". C'est étrange comme cette simple phrase peut être mal reçue. Et pourtant, rien de bien étonnant là dedans. Nous ressemblons forcément à notre mère, au moins un peu. Pour certaines personnes, c'est flagrant, le regard, l'allure, la façon de parler, le caractère, tout fait penser à elle. Pour d'autres la ressemblance est plus subtile, plus discrète. Elle s'affiche au détour d'une émotion forte, dans une petite habitude inconsciente, dans des sourcils froncés ou dans une ride d'expression.

Est-ce le hasard? Dans quelle mesure le patrimoine génétique de notre mère influence notre apparence et notre caractère? Combien notre enfance passée à ses côtés, sa façon de nous élever nous façonne? Et surtout, pourquoi avons-nous si peur de lui ressembler? Le décryptage de la psychologie et de la science sur ce sujet est passionnant.

Pour Demi Moore et sa fille Rumer Willis, la ressemblance est frappante voire même un peu angoissante :

That moment when you realize you actually are becoming your mother #twinning #imnotmad

Une photo publiée par Rumer Willis (@ruelarue) le 25 Mai 2015 à 18h08 PDT

Génétiquement, l'héritage du père est plus important

Génétiquement, les mammifères ressemblent plus à leur père qu'à leur mère, c'est la conclusion de l'étude conduite par le professeur Fernando Pardo-Manuel de Villena de l'Université de Caroline du Nord aux États-Unis et publiée en mars 2015 dans Nature Genetics. Si nous recevons autant de matériel génétique de la part de nos deux parents, il semblerait que les mutations génétiques transmises par notre père s'exprimeraient plus fortement que celles transmises par notre mère.

"95 gènes sont concernés par ce jeu d'influence, explique-t-il dans son article. On les appelle les gènes soumis à empreinte, ils peuvent jouer un rôle dans le fait ou non de développer telle ou telle maladie (comme le diabète, les maladies cardiaques, le schizophrénie ou les cancers), en fonction du fait que la mutation génétique viennent du père ou de la mère. Nous avons trouvé qu'en plus de ces gènes, des milliers d'autres sont sensibles du fait d'avoir été transmis par le père ou la mère".

Pour parvenir à ces conclusions, les chercheurs avaient sélectionné trois espèces de souris qui appartenaient à des sous-espèces de rongeurs élevées dans différentes parties du monde. Des croisements ont été réalisés et l'ADN des souris croisées parvenues à l'âge adulte a ainsi été étudié.

L'éducation de nos parents ne fait pas de nous des clones

Il suffit de comparer combien des membres d'une même fratrie peuvent être différents pour s'apercevoir que l'héritage génétique et l'éducation des parents ne sont pas les seuls critères pour forger une personnalité, l'environnement y est aussi pour beaucoup : on peut donc partager les mêmes gènes et avoir une personnalité aux antipodes.

La personnalité de chaque individu serait plutôt de l'ordre de l'acquis que de l'inné. Des chercheurs de l'Université d'Exeter et de l'Université d'Hambourg ont ainsi montré que les traits de personnalité des enfants adoptés étaient plus influencés par leur famille d'accueil et par leur environnement que le patrimoine génétique transmis par leurs parents biologiques. Leur étude a été publiée en juin 2013 dans la revue Biology Letters. Si vous partagez certains traits de caractère de votre mère, ce n'est pas forcément héréditaire mais aussi parce que vous l'avez vue faire.

Si on a peur de leur ressembler, c'est surtout qu'on a peur de vieillir

Des chercheurs ont prouvé qu'une mère et sa fille vont vieillir de la même manière. Si vous détestez les rides de votre maman, il va donc falloir vous y faire... En scannant les visages de plusieurs couples mère/fille, ils ont constaté que la peau, notamment autour des yeux, était semblable au niveau de la perte d'élasticité. Cette similarité était plus apparente lorsque la fille était dans une trentaine avancée. Matthew Camp et ses collègues ont examiné des mères et leurs filles se ressemblant, âgées de 15 à 90 ans, grâce à des modélisations en 3D. Au niveau des yeux, ils ont trouvé que les rides et l'affaissement de la peau se faisaient de la même manière.

La psychologie s'est aussi penchée sur la question. Selon la psychanalyste Brigitte Allain-Dupré interrogée sur Psychologies, "cette peur renvoie d’abord à celle de vieillir". Qui dit vieillir dit aussi avancer dans la vie, ainsi pour le psychothérapeute Pierre Lassus, "craindre de ressembler à l’un de nos parents ou de faire les mêmes erreurs, c’est manquer, vis-à-vis de lui, de distance".

Pierre-Henri Tavoillot, philosophe spécialisé dans les âges de la vie, décrit dans le magazine Neon de mai 2014 (lien payant), plusieurs phases de relation avec les parents:

L'enfance: l'admiration totale des enfants envers leurs parents
L'adolescence : la phase de rejet, "nous avons envie d'écrire notre propre histoire en balançant celle des vieux"
Les jeunes adultes: la période où "il s'agit de combiner l'histoire de nos parents et la nôtre"

De combiner car bien souvent, on se rend compte, après certaines remarques plus ou moins agréables, que sur quelques points, on ressemble un peu (trop) à ses parents. Et cela ne nous fait pas plaisir. Pourquoi? "Constater la ressemblance, c'est aussi faire le deuil de notre singularité", explique Neon.

"L'idéologie moderne, c'est de dire à chaque génération de faire table rase du passé et de tout recommencer à zéro. Chez les traditionalistes, au contraire, on n'innove pas, les ancêtres sont les héros. Ces deux idéologies sont fausses. Quand on a une vingtaine d'années, on est obligé à tout moment de concilier le passé, les racines et la perspective de l'avenir pour se déterminer soi-même", détaille le philosophe. Entre les tics et habitudes dont on n'arrive pas à se débarrasser et leurs gènes, d'un côté, et la personnalité et le mode de vie que l'on souhaite, de l'autre, la construction de soi est un long processus qui passe par des périodes d'imitation et d'autres de rejet.

La prochaine fois qu'on nous dira "On dirait ta mère", répondons "toi aussi" plutôt que de bouder dans un coin.

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