Ecole: l’ère des pionniers genevois

Edouard Claparède (deuxième depuis la gauche) et Pierre Bovet (à droite)
à Chéserex (VD) avec des amis, en 1915. La vie au grand air, la camaraderie et la libre discussion faisaient partie de la culture de l’Institut Rousseau. (Archives Jean-Piaget)

Fondé en 1912, l’Institut Jean-Jacques Rousseau a été l’un des lieux où s’élaborait, au tournant du siècle, une pédagogie nouvelle, calquée sur les besoins de l’enfant





Le choix du nom n’est pas allé de soi. Lorsqu’en 1911, le médecin et psychologue genevois Edouard Claparède prépare, avec une poignée de collaborateurs et d’amis, la création d’un institut voué aux sciences de l’éducation, tout le monde n’approuve pas sa proposition de le placer sous le patronage de Jean-Jacques Rousseau.

Le citoyen de Genève sent fort le soufre, y compris dans sa patrie. Et l’équipe a besoin d’appuis financiers – ainsi que quelque espoir de les obtenir si elle sait bien manœuvrer: plusieurs membres de la bonne société genevoise en font partie, comme les pédagogues Lucien Cellérier et Adolphe Ferrière ou le philosophe Adrien Naville, ou sont simplement des amis, comme le futur président du CICR Edmond Boissier.

Finalement, Claparède l’emporte: on fête en 1912 le centenaire de la naissance de Jean-Jacques, et cela permettra au nouvel institut de bénéficier de l’écho des festivités. Et de toute façon, le projet est audacieux: il s’agit de rien de moins que de concevoir, par des méthodes scientifiques, «un système éducatif gravitant autour de l’enfant» plutôt que d’essayer de «coucher l’enfant dans le lit de Procuste du système», comme est supposé le faire l’enseignement traditionnel. Un programme qui, pour Claparède, s’inscrit dans la droite ligne de l’Emile et qui, aujourd’hui encore, fait âprement débat.

Les temps, alors, sont favorables. Un peu partout en Europe, on s’efforce de repenser la pédagogie à la lumière des connaissances nouvelles acquises par la psychologie. Et Genève a de solides atouts. Le médecin Théodore Flournoy y a développé, avec Claparède, un laboratoire universitaire de psychologie expérimentale à la pointe des recherches qui se mènent alors sur la mémoire, les seuils de perception optique et auditive, les temps de réaction, etc.

Depuis 1904, Edouard Claparède travaille en outre avec les enseignantes des classes dites «spéciales» où sont accueillis les enfants souffrant de retard mental. Il étudie ces derniers et s’efforce de classer leurs difficultés tout en élaborant avec les enseignantes une pédagogie qui leur soit adaptée, une réflexion parallèle à celle que mène, au même moment en Italie, une autre pionnière de la pédagogie, Maria Montessori.

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