D’inquiétantes similitudes dans la psychologie des marchés





La main invisible du marché

Comme par le passé, des signaux de fin de cycle haussier ne manquent pas d’apparaître

Bertrand JacquillatIl existe certes des différences entre la psychologie des marchés d’aujourd’hui et celle qui prévalait lors des bulles passées, celle des “gogo years” des années 1960, la bulle Internet des années 2000 ou encore la hausse d’avant la crise de 2007. Et la crise est trop récente, voire encore trop présente, dans la mémoire collective pour que les débordements soient devenus trop importants. Certes les causes du momentum boursier actuel sont différentes mais la psychologie qui entoure celui-ci converge avec celle des bulles du passé.

Cinq ans de laxisme monétaire ont permis aux prix des actifs financiers d’être beaucoup plus élevés qu’ils ne l’auraient été en son absence. La capitalisation boursière américaine s’est accrue de 32 000 milliards depuis mars 2009, alors que l’économie n’a crû que de 1 000 milliards. Ce laxisme monétaire a permis de restaurer les bilans bancaires, mais cette amélioration ne s’est pas transmise à l’économie réelle. La vague de progression de l’endettement n’a pas reflué. A la recherche de rendement, les investisseurs ont fait chuter le prix du risque qui a rejoint ses niveaux de 2007, tandis que les prêts risqués représentent aujourd’hui 45 % de l’encours des dettes syndiquées.

Certes le cycle boursier haussier des actions commencé en 2009 semble bien établi, sans que le sentiment de marché soit devenu euphorique. Il peut même continuer un certain temps, surtout à la suite de la décision prudente de la Réserve fédérale de ne pas amorcer le reflux de sa politique monétaire non conventionnelle. Mais des signaux de fin de cycle haussier ne manquent pas d’apparaître : le montant des achats d’actions avec effet de levier, les valorisations très confortables des sociétés face à des perspectives de croissance économique très modeste, et la hausse des fusions acquisitions.

Et cette hausse des actions intervient alors même que, si l’on en croit le phénomène de retour à la moyenne des primes de risque, les perspectives de rentabilité boursière sur les dix prochaines années n’ont jamais été aussi faibles historiquement, mises à part les années 1998-2000. Sauf à comparer les perspectives de rentabilité avec celles encore pires du marché obligataire, on a du mal à justifier comment ce “bull market” peut se poursuivre, sauf à être suffisamment jeune pour ne pas être inhibé par le souvenir des blessures du passé.

Par Bertrand Jacquillat

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