Détresse dans le pré

Près d’un agriculteur québécois sur deux est en détresse psychologique, résultat d’un important stress quotidien et de la lourde tâche de travail, dévoile une étude.

«Je ne suis pas surprise, mais c’est troublant», avoue Ginette Lafleur, auteure de l’étude présentée hier au congrès de l’Association francophone pour le savoir (ACFAS).

Doctorante en psychologie communautaire à l’Université du Québec à Montréal, cette dernière s’est penchée sur la santé mentale des producteurs laitiers du Québec, de la France et de la Suisse. Environ 600 agriculteurs de chaque pays ont répondu au questionnaire de l’étude.

Résultat: 46 % des agriculteurs québécois sont en détresse psychologique, soit un peu plus qu’en France (42 %), mais un peu moins qu’en Suisse (48 %). À titre comparatif, environ 18 % des travailleurs québécois vivent cette forme de détresse.

«Ce sont des gens qui sont plus vulnérables, ou à risque de développer des troubles anxieux ou de dépression, ajoute l’auteure. Les préoccupations des Québécois et des Européens sont différentes, mais globalement, leur situation psychologique est semblable.»

Par ailleurs, 45 % des agriculteurs québécois considèrent leur niveau de stress quotidien élevé, soit beaucoup plus que dans la population (27 %).

« Cocktail explosif »

Plusieurs facteurs entrent en ligne de compte pour expliquer cette situation (voir tableau). Ginette Lafleur croit aussi que la multiplication des tâches depuis quelques années y est pour quelque chose.

«C’est un cocktail explosif, dit-elle. C’était déjà un métier exigeant, et maintenant ils ont plein de nouvelles tâches administratives et informatiques.»

Autre fait inquiétant: 6,1 % des répondants québécois à l’étude avaient eu des idées suicidaires durant l’année qui a précédé le sondage. C’est quatre fois plus que dans la population générale (1,9 %).

Sauvés par leurs enfants

« Ceux qui m’ont le plus touchée, ce sont les agriculteurs qui ont écrit avoir pensé au suicide, et qui ont été sauvés par leurs enfants, confie l’auteure. C’est extrêmement troublant.»

Malgré ce portrait inquiétant, Ginette Lafleur souhaite que ces données aident à trouver des pistes d’aide aux agriculteurs.

« Je ne veux pas que ce soit un assommoir et que ça décourage la relève, dit-elle. Mais, il faut trouver des solutions pour les aider. La famille peut d’ailleurs jouer un rôle important.»

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