Colloque «Un Québec fou de ses enfants» – Les parents québécois …

Ils ont plus d'argent qu'autrefois, mais manquent de temps pour leur famille. C'est l'insoluble dilemme auquel les parents québécois sont confrontés aujourd'hui, 20 ans après la publication du rapport du psychologue Camil Bouchard, qui s'intitulait Un Québec fou de ses enfants.

Les années qui ont suivi ce rapport, en 1990-1991, ont vu l'avènement des garderies à 5 $ par jour, puis à 7 $, les congés de maternité et de paternité prolongés. Et aujourd'hui, plus de 65 % des parents québécois se plaignent de manquer de temps, tandis que seulement un peu plus de 10 % se plaignent de manquer d'argent, selon un sondage présenté hier par Camil Bouchard. M. Bouchard participait hier à un colloque organisé par la Fondation Lucie et André Chagnon sur les vingt ans du rapport Un Québec fou de ses enfants.

Il ne s'agit pas pour autant de balayer le problème de la pauvreté. En fait, l'un des grands échecs des politiques familiales québécoises des dernières années est le fait que les services de garde à 7 $, et ceux offerts par les CPE en particulier, n'atteignent pas toujours les enfants issus de milieux défavorisés.

Depuis 1997, les services de garde ont en effet intensément offert leurs services aux mères qui sont sur le marché du travail, ajoute M. Bouchard. Avec pour effet, par exemple, que les services de CPE sont peu développés en milieu défavorisé. Certaines mères recevant l'aide sociale n'ont d'ailleurs pas l'argent pour profiter des services de garde à 7 $ par jour. «Dans certaines cultures, il est aussi mal vu pour une mère de se séparer de ses enfants», disait hier le Dr Richard Lessard, directeur de la santé publique de Montréal.

«Il arrive que des gens me parlent de mères qui envoient leurs enfants à la garderie même si elles ne travaillent pas, dit Camil Bouchard. Eh bien moi, je dis tant mieux.»

Car les enfants qui ne fréquentent pas du tout la garderie avant l'entrée à l'école ont souvent des retards en matière de stimulation lorsqu'ils entrent à l'école. «Ils vivent aussi une différence culturelle», ajoute pour sa part le Dr Lessard.

L'économiste Pierre Fortin, quant à lui, a démontré que le niveau de vie des Québécois avait considérablement augmenté au Québec depuis vingt ans et que l'écart était resté stationnaire entre les pauvres et les riches. Ce revenu a augmenté de 24 % pour toutes les familles québécoises, de 1996 à 2009, de 30 % pour les familles biparentales et de 63 % pour les familles monoparentales, dit-il.

De son côté, le psychologue Richard Cloutier, de l'école de psychologie de l'Université de Montréal, a plutôt proposé la modération dans l'habitude d'envoyer les enfants à la garderie cinq jours sur sept, 355 jours sur 365. «Envoie-t-on les enfants à l'école dès leur naissance?», s'est-il demandé. Par ailleurs, Richard Cloutier maintient que la pauvreté, qu'elle soit matérielle ou psychologique, est l'ennemi numéro un du bien-être des enfants, et le profil de la clientèle de la direction de la protection de la jeunesse en témoigne, dit-il.

En matière de services à la famille, le Québec se situe en général au-dessus des États-Unis, et en deçà des pays scandinaves et des Pays-Bas.

Plus tôt dans la journée, la chercheuse Hélène Desrosiers, de l'Institut de la statistique du Québec, présentait quant à elle des données inquiétantes sur la détresse psychologique des jeunes. Ainsi, une étude de 1999 indiquait que 8 % des enfants de 9 ans avaient sérieusement pensé à se suicider durant l'année précédant l'enquête. En 2008, 12 % des enfants de 3 à 14 ans présentaient un niveau modéré ou sévère de difficultés socio-émotionnelles. Hélène Desrosiers travaille présentement notamment sur l'impact des ruptures familiales sur le bien-être des enfants.

Leave a Reply