Ce psychologue dont les travaux étaient bâtis sur des mensonges

La fin de carrière de Diederik Stapel était prévisible : Ce professeur en psychologie sociale avait fait savoir plus tôt au cours de cette année à son épouse qu’il était « gravement malade ». Cette affirmation était peut-être vraie, mais elle ne donnait pas encore à l’intéressé cette image de chercheur pitoyable qu’il traine depuis un mois au sein de la communauté scientifique et au-delà. Récemment, Diederik Stapel a touché le fond : Il a reconnu avoir inventé de toute pièce plusieurs de ses expériences qu’il avait falsifiées à l’aide de données qui sortaient de son esprit. Et il demande pardon, déclarant que «  la pression était devenue trop forte au fil du temps ». Mais personne ne peut ni ne veut accepter ses excuses.

Et les réactions des collègues et victimes de ce « fraudeur » se multiplient au pays des polders. Bram Buunk, professeur en psychologie sociale évolutionniste qui avait introduit Diederik Stapel à l’Université de Groningen en 2000, avait remarqué assez tôt l’attitude bizarre de ce dernier : « Nous pensions tous qu’il était génial. Au bout de quelques temps, il ne voulait plus travailler avec moi. Aujourd’hui je comprends pourquoi. Il cherchait en fait à se mettre à l’abri des regards indiscrets ». Diederik Stapel a entre autre réalisé des travaux portant sur l’effet du pouvoir sur l’hypocrisie, sur les stéréotypes raciaux ou encore sur la manière dont la publicité affecte la façon dont les gens se voient (leur identité).

 Le professeur Pim Levelt, responsable de la commission d’enquête menée sur les travaux du fraudeur, est le premier à s’ériger contre l’image de victime derrière laquelle semble vouloir se glisser Diederik Stapel : « La pression est lourde pour beaucoup de scientifiques, mais aucun n’aurait l’idée de falsifier des travaux. Les agissements de Diederik Stapel, qui était devenu le seul à avoir accès aux données brutes de ses recherches, ont porté un coup à la confiance accordée à la science ». A ce jour, Pim Levelt et ses collaborateurs ont trouvé 30 articles de revues qui sont « certainement faux », et la liste pourrait s’allonger. Les Universités, de leur côté, estiment que 14 des 21 thèses de doctorat qu’il a supervisées seraient douteuses.

Jelte Wicherts, psychologue de l’Université d’Amsterdam, souligne que ce cas n’est malheureusement pas isolé. Et la communauté scientifique néerlandaise a encore en mémoire le cas du professeur René Diekstra, condamné pour plagiat en 1996, après avoir repris à son compte de nombreux passages d’écrits scientifiques. Et le cas de Hwang Woo-suk, en Corée du sud, fut autrement plus grave. Ce dernier avait récolté des millions d’euros en fonds de recherche pour des travaux sur les cellules souches. Et c’est à tort qu’il avait affirmé, en 2006, être en mesure de cloner ces cellules. Que penser, par ailleurs, du physicien allemand Jan-Hendrik Schön : Pressenti pour le prix Nobel de physque, il compilait des données au gré de son imagination et les a fait publier, tout comme Diederik Stapel, dans la revue Science.

 

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