Belle-mère: le rôle de la méchante?

Si les mamans exercent le plus beau métier du monde, celui des marâtres est bien moins envié. Il faut dire que la tâche se révèle particulièrement ardue...

Elles ont généralement mauvaise presse. A l’image de la méchante reine dans Blanche-Neige. Si jalouse de la beauté de sa belle-fille qu’elle tente par trois fois de lui ôter la vie! La marâtre de Cendrillon ne se montre guère plus clémente. Elle qui éprouve un malin plaisir à charger sa fille adoptive des corvées les plus dégradantes.

Pourquoi cette image si négative? Le problème serait d’abord lié à un certain manque d’autorité de la part du père…

Le papa, qui ne voit généralement ses enfants qu’un week-end sur deux, a tendance à tenir le rôle du gentil. La belle-mère est alors obligée de se montrer plus stricte et donc de jouer la méchante,

explique Nahum Frenck, thérapeute de la famille à Lausanne. Et c’est compter sans le fait que «les enfants se montrent généralement bien moins indulgents avec leur belle-mère, qu’ils ne considèrent pas encore comme un membre de la famille...»

«Les belles-mères auraient tort de s’en vouloir»

C’est alors que les marâtres culpabilisent de ne parvenir à mettre en place une relation aimante avec la progéniture de leur conjoint. «Les enfants faisaient partie du package lorsqu’elles se sont mises en couple, elles ne les ont pas désirés! Les belles-mères auraient donc tort de s’en vouloir… Elles ont d’abord à se faire respecter en tant qu’adulte. Ensuite, si des sentiments plus profonds émergent, c’est la cerise sur le gâteau!»

La tâche serait un peu plus facile pour les femmes déjà mères avant cette nouvelle union. «Le changement de vie est moins drastique, puisqu’elles avaient déjà l’habitude de vivre avec des enfants, indique Séverine Cesalli, pédopsychiatre à Martigny. Quant aux enfants, ils sont généralement moins compliqués que les adultes et réussissent souvent à bien s’entendre entre eux. Ce qui contribue au développement de l’identité de la nouvelle famille.»

Il reste encore un autre acteur à mentionner, dont l’influence est plus que déterminante: la maman! «Il est très important que l’ancienne et la nouvelle femme entretiennent une relation cordiale, conseille Nahum Frenck. Mais la plupart du temps, elles se crêpent le chignon!» C’est alors que les enfants s’interdisent eux-mêmes de trop se rapprocher de leur belle-mère…

Il n’est pas nécessaire que la maman critique ouvertement la marâtre,

ajoute Séverine Cesalli. Des signes non verbaux peuvent suffire à donner l’impression aux enfants qu’ils ne sont pas autorisés à développer des sentiments amicaux pour elle.»

Une loyauté envers la mère qui peut aller jusqu’à inciter les enfants à se montrer particulièrement désagréables avec leur marâtre. Comme le sont d’ailleurs très souvent les filles adolescentes, a pu remarquer le pédiatre lausannois lors de ses consultations. «Elles sont jalouses! Les filles, amoureuses de leur père, ont du mal à supporter sa nouvelle compagne et rêvent de l’éjecter!» Et les garçons alors? «Ils sont comme leur père à la recherche d’une petite amie… Ils arrivent donc mieux à comprendre son choix.»

Entre efforts d’organisation et nouveau cadre de vie

Si les familles recomposées ont encore mauvaise réputation, c’est que la société les perçoit le plus souvent comme des sources de problèmes. «On devrait plutôt les voir comme des solutions, regrette la psychiatre valaisanne. Les divorces engendrent souvent une grande souffrance psychologique (et financière!). Ces nouvelles familles peuvent alors recréer des cadres de vie meilleurs pour les enfants, pour autant que l’investissement relationnel positif des uns et des autres ne soit pas empêché.»

Et cela même si ces nouvelles configurations demandent de gros efforts au niveau de l’organisation… «Ce sont désormais quatre agendas à coordonner, met en garde Nahum Frenck. Avec le risque que ces nouveaux couples manquent de temps pour construire leur relation.»

Texte © Migros Magazine – Alexandre Willemin

 

Leave a Reply