Les ragots, potins et autres rumeurs sont partout en ce moment… mais quel est leur rôle en psychologie ? Que disent-ils sur nos liens sociaux ?
Il y a quelques jours, Valérie Trierweiler, l’ex-compagne de notre Président de la Eépublique actuel, a publié un livre sur sa relation avec François Hollande. Si les réactions varient selon les personnes, tout le monde s’accorde à peu près à dire que tout ce déballage d’intimité est tout de même un peu sale, n’a rien de très politique, et que, bien sûr, mieux vaut ne pas le lire (nous valons mieux que ça)….
Et en même temps, en deux temps, trois mouvements, le livre a fuité sur la Toile et s’est vendu comme un petit pain bien chaud.
Finalement, il est fort probable qu’un bon paquet de gens soient titillé spar l’envie de savoir si François est plutôt pyjama ou vieux t-shirt pour dormir, si le Président préfère les Granola ou les Petits Écoliers – ce genre de détails extrêmement importants pour la politique de notre pays.
Chacun-e d’entre nous oscillerait entre l’envie de savoir ce que notre voisin trafique derrière sa porte fermée et l’idée que ragoter, ce n’est pas très chouette (et que l’on n’aimerait pas que le ragot se fasse sur notre dos).
Pourquoi sommes-nous attirés par les ragots ? Pourquoi nous semblent-ils aussi irrésistibles qu’une bonne raclette (vous savez, celle qui vous écœure un peu) ?
Dans le magazine Cerveau Psycho, Christiane Gelitz revient sur nos tendances à faire circuler des potins et nous donne quelques éléments de réponse.
Les ragots auraient une fonction sociale et pourraient être bénéfiques pour le groupe
Pour le psychologue Paul Bloom, les ragots auraient une fonction sociale : dans un groupe, échanger des informations sur d’autres personnes permettrait aux membres du groupe de construire des relations et de renforcer leurs liens. Disons que nous utilisons les choses que nous savons à propos de telle ou telle personnes pour tisser des liens avec d’autres gens.
Le ragot pourrait permettre de diminuer un isolement social (qu’il soit réel ou perçu) et à répondre à notre besoin d’appartenance. De là à imaginer que Valérie se soit sentie bien seule et que son livre soit surtout une tentative pour retrouver du lien social, il n’y a qu’un pas… que nous ne franchirons pas !
Selon Roy Baumesteir, les informations contenues dans le ragot nous donneraient également des billes sur les règles et normes sociales. Ainsi, si vous débarquez dans une nouvelle école, les discussions lors des pauses sur telle ou telle personne pourront vous aider à comprendre comment fonctionne le groupe et ce qu’il est socialement acceptable de faire ou non.
Les ragots remplissent Saint Pétersbourg dans Anastasia
Si en arrivant dans une nouvelle entreprise, vous entendez au détour d’un couloir que « Fred a encore répondu à un appel perso pendant notre réunion, ce gros relou », vous saurez que vos nouveaux collègues n’apprécient peut-être pas ce genre de comportement et cette information pourra être utile à votre intégration. Qui est copain avec qui, qui a tel ou tel type de vie, quelles sont les normes du groupe, quels sont les critères d’appartenances… Toutes ces informations pourront nous permettre de former, modifier ou maintenir notre réseau social.
Le ragot pourrait ainsi aider à nous lier les uns aux autres : il pourrait nous permettre de rire ensemble (« tu te souviens de la fois où Martin a fait ceci ? »), de partager, d’échanger de l’information… Le ragot créerait des attaches : nous les partageons avec les personnes dont nous souhaitons être plus ou moins proches.
En somme, le ragot crée une forme de lien social, renforce nos relations et peut être bénéfique pour le groupe.
Mais les ragots pourraient également être des agressions indirectes
Si les ragots ont une fonction sociale et peuvent nous permettre de nous lier les uns aux autres, ils peuvent également être des agressions indirectes et remplacer la violence physique.
Parfois, nos ragots peuvent traduire une intention de nuire, ou du moins, une intention de s’imposer (avec son livre, Valérie Trierweiler a peut-être eu l’intention de s’imposer dans l’espace public ?).
Si je raconte à Machine que Trucmuche, sa meilleure amie, a fait telle ou telle crasse, je risque bien de briser leur amitié…. Et de modifier le groupe. Si je raconte en public qu’un Président de la République donne des petits surnoms aux plus pauvres, mon intention peut bien être de flanquer le bordel entre l’élu et les citoyen-ne-s.
En colportant un ragot, je peux souhaiter mettre à l’écart une personne, créer des difficultés dans ses relations avec les autres, déconstruire les liens des membres d’un groupe.
Le ragot est alors une forme d’agression bien réelle et, dans ce cas, lorsque je propage un ragot, j’exerce une influence négative – que j’en sois consciente ou non.
Derrière nos mots, donc, pourraient se cacher des agressions – et si les ragots en disaient plus sur ceux qui les propagent que sur leurs cibles ?
Pour aller plus loin…
- Un article de Christiane Gelitz pour Cerveau Psycho
- Un article de Psychology Today
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