Peut-on encadrer la profession de «psy»?



«Au printemps dernier, j’ai cherché un psy pour m’aider face à diverses difficultés professionnelles et personnelles ; je ne savais trop vers quel spécialiste me diriger, mais je savais qu’un décret récent avait réglementé cette profession et cela m’a rassurée».
Christine qui parle aujourd’hui avec satisfaction de son thérapeute avait du mal, comme tant d’autres, à se retrouver dans le paysage complexe du soin psychique, entre psychiatres, psychologues, psychanalystes, psychothérapeutes, psychopraticiens et autres gestalt-thérapeutes ou somatothérapeutes…Elle a donc demandé à consulter la liste des psychothérapeutes agréés auprès de la Délégation territoriale de l’agence régionale de santé (DTARS) dont elle dépend, afin de vérifier que le nom qui lui avait été recommandé par ailleurs y figurait bien. «Je voulais m’assurer que le psy que j’allais choisir avait la compétence et la déontologie nécessaires pour exercer cette profession»
, poursuit la jeune femme.

Depuis le décret du 9 août 2009, puis son décret d’application du 20 mai 2010, modifié par le décret du 7 mai 2012, chaque département doit mettre en effet à disposition la liste Adeli (Automatisation des listes) des psychothérapeutes, afin de permettre à tout un chacun de se renseigner et de choisir un thérapeute en connaissance de cause.

Désormais, l’usage du titre de psychothérapeute est réservé à trois catégories de praticiens : les psychiatres, c’est-à-dire des médecins ayant fait trois ans de spécialisation en psychiatrie ; les psychologues cliniciens, ayant un master 2 de psychologie clinique avec stages professionnalisants et étant supervisés ; les psychanalystes, c’est-à-dire des personnes ayant suivi une psychanalyse et étant supervisées dans le cadre de leur association de psychanalystes.

Ces trois catégories peuvent s’inscrire automatiquement sur le répertoire Adeli des psychothérapeutes, auprès de leur DTARS. Les autres doivent valider un nombre d’heures obligatoires de formation et passer devant une commission, siégeant dans une agence régionale de santé, qui valide leurs diplômes et leurs expériences.

Le titre de psychothérapeute est donc aujourd’hui commun à divers professionnels : psychiatres et psychologues, mais aussi – dès lors qu’ils ont suivi les obligations de formation –, certains infirmiers psychiatriques, psychanalystes et médecins. De même, ce titre recouvre des pratiques très différentes dans leurs approches et leurs méthodes : thérapie cognitive, EMDR, thérapie familiale ou comportementale, psychodrame, cure psychanalytique, relaxation, art-thérapie… Elles ont toutes pour objectif de traiter et d’apaiser des souffrances psychologiques et psychosomatiques.

En fait, peu de conseils généraux semblent avoir les moyens pratiques de tenir cette liste à jour. «Nous n’avons pas le temps de vérifier si les psychothérapeutes qui demandent à s’inscrire sont bien autorisés à exercer»
, s’excuse-t-on, par exemple, à la DTARS de la Sarthe, avant d’envoyer par courriel une liste de dix psychothérapeutes libéraux agréés.

Pourtant l’idée d’encadrer la profession de psychothérapeute est une bonne chose et beaucoup, parmi les professionnels concernés, s’en réjouissent. «Jusqu’il y a peu, n’importe qui pouvait poser sa plaque de psychothérapeute et, du coup, cela laissait planer des soupçons sur l’ensemble des psys»,
estime cette psychologue clinicienne qui a ouvert son cabinet de psychothérapeute en 2001, en Seine-et-Marne. C’est bien dans ce but que le député (UMP) de Haute-Savoie Bernard Accoyer, ORL de formation, avait proposé de réglementer la profession.

Aujourd’hui cependant, bon nombre de praticiens regrettent que ce décret ne change pas grand-chose. «Ce qui est protégé, c’est l’usage du titre mais pas l’exercice de la psychothérapie»,
affirme ainsi le médecin et psychothérapeute parisien Michel Meignant, président fondateur de la Fédération française de psychothérapie (FF2P). Et de souligner le côté «paradoxal»
d’un tel décret qui «autorise l’usage d’un titre à ceux qui ne l’utilisent pas et l’interdit à ceux qui pourraient l’utiliser»
.

En effet, les psychiatres, les psychologues et les psychanalystes ne se déclarent généralement pas sous le titre de psychothérapeute, alors que les psychothérapeutes professionnels qui ne sont ni médecin, ni psychanalyste, ni psychologue, ne peuvent, eux, s’en prévaloir, même quand ils ont acquis une longue expérience.

Quant à l’utilité de ce décret pour protéger les patients d’éventuelles pratiques irrégulières, beaucoup en doutent également dans la mesure où nulle autorité n’exerce un contrôle déontologique. «Cela serait différent s’il existait un ordre des psychothérapeutes»
, poursuit Michel Meignant, qui fut l’un de ceux qui ont introduit l’EMDR (Eye movement desensitization and retroprocessing)
en France, cette thérapie comportementale et cognitive (TCC) recommandée depuis 2007 par la Haute Autorité de la santé pour le traitement des stress post-traumatiques.

En effet, à la différence des médecins qui ne peuvent exercer que s’ils sont inscrits à l’Ordre des médecins (organisme professionnel, administratif et juridictionnel de défense et de régulation de la profession médicale créé en 1940 sous le régime de Vichy), les psychothérapeutes, tout comme les psychologues, n’ont pas souhaité, jusqu’à présent, voir se créer une telle instance.

Certains psychothérapeutes vont même plus loin en décidant de ne pas s’inscrire sur la liste Adeli. C’est le cas du psychologue clinicien et psychothérapeute Didier Pleux, directeur de l’Institut français de thérapie cognitive (IFTC), qui considère le décret modifié en 2012 comme une «tartufferie»
 : «en ce qui concerne les psychanalystes, la reconnaissance de leur titre de psychothérapeute ne repose pas sur un diplôme de psychiatrie ou de psychologie clinique et ne vérifie pas qu’ils sont capables de poser un diagnostic»,
s’exclame-t-il, agacé.

Selon lui, un psychothérapeute doit être un «médecin du psychisme»
, ayant la capacité et la liberté d’utiliser diverses méthodes thérapeutiques, adaptées au patient.

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VERS QUEL «PSY» SE TOURNER ?

Par « psy », on désigne une galaxie composée de quatre grandes familles:

Les psychiatres:
médecins ayant fait trois ans  de spécialisation en psychiatrie et dont le titre atteste de leur formation à reconnaître les maladies mentales et leurs traitements, notamment médicamenteux. Principales indications : psychoses, tendances suicidaires, troubles de la personnalité…

Les psychologues:
formés (bac + 5) à l’université à l’écoute de la souffrance psychique. Principales indications : difficultés relationnelles, troubles de comportement…

Les psychanalystes:
ayant été eux-mêmes psychanalysés pendant des années, leur approche, reposant sur les notions d’inconscient et de transfert, consiste à favoriser une prise de conscience d’éléments refoulés. Principales indications : dépressions, souffrances durables trouvant pour une part ses origines dans l’histoire familiale…

Les psychothérapeutes:
on recense plus de 200 formes de psychothérapie. Parmi les principaux courants, les thérapies comportementales et cognitivistes (TCC) mettent le patient en présence de ses craintes et convictions, afin d’affronter l’anxiété qui en résulte. Principales indications : phobies, difficultés relationnelles, troubles obsessionnels compulsifs…

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