Le hockey est-il violent par essence? Pour quelles raisons les joueurs sont-ils superstitieux? Et pourquoi la perte des Nordiques de Québec a-t-elle fait si mal?
De toute évidence, les questions surgissent lorsqu’un psychologue se penche sur le hockey, en particulier celui pratiqué dans la Ligue nationale. C’est justement ce que compte faire le professeur Simon Grondin, de l’École de psychologie, lors de sa conférence du 10 mai au pavillon Charles-De Koninck. Ce passionné de hockey, doublé d’un fin connaisseur de l’histoire de la Ligue nationale, entretiendra son auditoire du thème traité dans Le hockey vu du divan, un essai qu’il a publié en 2012 aux Presses de l’Université Laval. La communication aura lieu dans le cadre des activités spéciales grand public du Congrès de l’Acfas.
Sport spectaculaire s’il en est un, le hockey sur glace se caractérise par la rapidité et l’habileté des joueurs sur la patinoire. Il comporte, en particulier dans sa version nord-américaine, un bon degré de rudesse, voire de violence dont la bagarre à coups de poing constitue l’expression ultime. «Je comprends que ces gestes sont dans la culture de ce sport, souligne Simon Grondin. Mais à un certain moment, on peut décider que le hockey n’a pas à être comme ça.»
Ce dernier estime que la solution aux gestes disgracieux réside dans des sanctions sévères. Ces sanctions devraient faire mal tant aux joueurs fautifs qu’à leur équipe. D’autant plus que, selon le professeur, moins de violence ne nuirait pas à l’intensité du jeu. Simon Grondin croit que les joueurs perdent parfois leurs repères, le gros bon sens, dans le feu de l’action. «Il faut les protéger contre eux-mêmes», affirme-t-il.
En ce domaine, les durs à cuire, les «goons», sont dans une classe à part. Au niveau junior, ces joueurs au talent limité, mais qui aspirent à la Ligue nationale, sont encouragés à développer leur talent de pugiliste. Ils l’acceptent d’autant plus que ce type de comportement est valorisé sur la glace, en plus d’être toléré par le système de justice. Mais ce cheminement a un coût. Ces joueurs vivent un stress démesuré parce qu’ils reçoivent et donnent des coups de poing. Cela va à l’encontre des vertus du sport et du comportement normal en société.
Simon Grondin croit qu’accepter la violence comme ils le font entraîne nécessairement des séquelles. «Ce comportement, explique-t-il, peut conduire à l’abus d’alcool et de drogues dures. À l’été 2011, la Ligue nationale a déploré la mort de trois de ses bagarreurs. Ils étaient âgés de 27, 28 et 35 ans. Deux d’entre eux se sont suicidés.»
Dans la pratique de son sport, un hockeyeur peut avoir des comportements irrationnels. Ce n’est une question ni d’intelligence, ni d’instruction, ni de talent. Même les plus grands athlètes peuvent être superstitieux. Pensons au gardien de but Patrick Roy qui parlait aux poteaux de sa cage avant d’entreprendre une partie. Ou bien au gardien Ken Dryden qui pensait connaître un mauvais match si le premier lancer pendant la période d’échauffement n’atteignait pas la bande à la droite de son filet. «Les humains ont beaucoup de comportements irrationnels, souligne le professeur. Il est normal que les sportifs en aient. À plus forte raison lorsque les enjeux sont importants. Pourquoi? Parce qu’on a besoin de contrôle. L’important n’est pas le contrôle réel, mais bien l’impression de contrôle.»
Les Nordiques de Québec ont quitté la capitale en 1995. Les amateurs ont vécu à cette occasion un deuil, celui de l’illusion d’éternité. La présence de cette équipe professionnelle incarnait une certaine continuité, un sentiment de stabilité dans un monde où tout change rapidement. De nombreux amateurs avaient développé un profond sentiment d’appartenance aux Nordiques. Le jour du départ, ils se sont sentis dépossédés. «L’identification à l’équipe peut avoir des bienfaits psychologiques importants, indique Simon Grondin. L’équipe devient une extension de soi. Les partisans arrivent à s’approprier la réussite des joueurs comme s’il s’agissait de la leur.»
Simon Grondin, Le hockey vu du divan. Vendredi 10 mai à 12h, dans l’atrium du pavillon Charles-De Koninck. Entrée libre. Réservation recommandée à l’adresse inscriptionacfas@fss.ulaval.ca.